Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/464

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Édouard songea dès ce moment à avoir une explication avec Jeannette. Il l’avait reconnue à la première vue pour la vieille femme qui l’avait soigné dans sa maladie, quand il était sorti des mains de Gifted Gilfillan. La cabane aussi, quoique un peu réparée et mieux meublée, était celle où il avait été retenu. Il se rappela aussi un tronc d’arbre, dans la lande de Tully-Veolan, qu’on appelait l’arbre du Rendez-vous ; et il ne doutait pas que ce ne fût celui où s’étaient réunis les montagnards dans cette nuit mémorable. Des motifs que le lecteur comprend sans doute l’avaient empêché d’interroger Jeannette sur ce sujet en présence du baron.

Sa première question fut de demander quelle était la jeune dame qui l’avait visité durant sa maladie. Jeannette garda un instant le silence, et pensant enfin que révéler ce secret ne nuirait à personne : « C’est, dit-elle, une jeune dame qui n’a pas sa pareille au monde, miss Rose Bradwardine ! »

Alors c’est sans doute aussi à miss Rose que je dois ma délivrance, » dit Waverley enchanté de voir confirmer une idée que les circonstances locales avaient déjà fait naître. — Sans doute, monsieur Waverley ; mais combien elle eût été affligée, la pauvre demoiselle, que vous en apprissiez quelque chose ! car elle m’avait ordonné de parler en langue gaëlique quand vous pouviez entendre, afin de vous faire croire que vous étiez parmi les montagnards. Je sais parler cette langue, parce que ma mère était montagnarde.

Quelques autres questions apprirent à Waverley tous les détails de sa délivrance : jamais musique ne parut si harmonieuse à un amateur que le fut aux oreilles de Waverley le bavardage de la vieille Jeannette racontant jusqu’aux circonstances les plus minutieuses. Mais mon lecteur n’est pas amoureux, et pour ne pas lasser sa patience, j’essaierai de resserrer dans des limites raisonnables le récit de la vieille Jeannette, qui dura près de deux heures.

Quand Waverley communiqua à Fergus la lettre que lui avait envoyée miss Bradwardine par Davie Gellatley, et par laquelle Rose lui annonçait qu’un parti de troupes occupait Tully-Veolan, cette circonstance avait frappé l’esprit vif et actif du chef. Désirant enlever à l’ennemi ses positions, ne pas le laisser s’établir si près de lui, et enfin rendre service au baron (car l’idée d’un mariage avec miss Rose se présentait souvent à lui), il résolut d’envoyer quelques-uns de ses gens pour déloger les rouges, et