Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/441

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vous portez-vous ? Émilie, ma chère, c’est le jeune Stanley. »

Le visage de la jeune femme se colora pendant qu’elle faisait à Waverley un accueil où la politesse se mêlait à la cordialité. Sa main tremblante et sa voix mal assurée montraient combien elle était émue et troublée. On rapporta le dîner. Pendant que Waverley prenait quelques rafraîchissements, le colonel continua : « Je m’étonne de vous voir ici, Franck ; les médecins m’ont dit que l’air de Londres ne convenait pas à votre santé. Vous n’auriez pas dû vous y exposer ; je n’en suis pas moins charmé de vous voir, et mon Émilie aussi ; mais je crains que nous ne puissions compter sur le plaisir de vous voir long-temps. »

« Des affaires particulières m’ont amené ici, » murmura Waverley. — « C’est ce que je suppose ; mais je ne vous permettrai pas d’y faire un long séjour. Spontoon (s’adressant à un vieux domestique sans livrée, à la tournure militaire), emportez cette valise ; vous viendrez vous-même si je sonne ; qu’aucun autre de mes gens ne vienne nous déranger ; j’ai à parler d’affaires avec mon neveu. »

Quand les domestiques se furent retirés : « Au nom du ciel, Waverley, quelle affaire vous amène à Londres ? votre vie y est en péril. »

« Cher monsieur Waverley, dit lady Émilie, vous à qui je ne pourrai jamais témoigner toute ma reconnaissance, comment avez-vous commis une telle imprudence ? — « Mon père… mon oncle… cet article… » Il présenta la gazette au colonel Talbot.

« Je voudrais que les coquins fussent condamnés à être écrasés sous leurs presses ! dit le colonel. On m’a assuré qu’il ne se publiait pas moins de douze de ces gazettes à Londres ; il n’est pas étonnant qu’ils soient obligés d’inventer des mensonges pour procurer le débit de leurs feuilles. Cependant, mon cher Édouard, il est vrai que vous avez perdu votre père ; mais quant à cet embellissement, ajouté par le rédacteur, que le chagrin des poursuites dirigées contre lui a troublé son esprit et hâté sa mort, la vérité est, car, — quoiqu’il soit pénible de vous le dire, cela vous délivrera du poids d’une terrible responsabilité, — la vérité est que monsieur Richard Waverley, dans toute cette affaire, a montré la plus grande indifférence sur votre sort et sur celui de votre oncle. La dernière fois que je le vis, il me dit d’un air joyeux, que puisque j’étais assez bon pour me charger de vos intérêts, il avait pensé qu’il serait mieux d’entamer une négociation séparée