Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/439

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même sujet. « Nous voilà à Titersbridge, dit-elle. Il y a un parti de nos dragons chargé de prêter main-forte aux sergents, constables, juges de paix, et à cette espèce de gens qui examinent les passe-ports et qui arrêtent les rebelles ; et voilà tout. » À peine étaient-ils arrivés à l’auberge qu’elle tira Waverley à la fenêtre, en s’écriant : « Voilà le brigadier Bridoon de notre compagnie ; il vient avec le constable ; Bridoon, un de nos agneaux, comme Nosebag les appelle. Vous, monsieur… monsieur… ; comment vous nommez-vous, monsieur ? »

« Butler, madame, » dit Waverley, croyant plus prudent de s’attribuer le nom d’un de ses camarades que de s’exposer à être découvert en en prenant un qui n’existait pas au régiment.

« Ah ! vous avez été fait capitaine il n’y a pas long-temps, quand ce gredin de Waverley passa aux rebelles. Ciel ! que je voudrais que ce vieil animal de capitaine Crump passât aussi aux rebelles pour que Nosebag devînt capitaine. Ciel ! qu’a donc ce Bridoon à se tenir là en se dandinant sur la porte ? Que je sois pendue s’il n’est pas dans les brouillards, comme dit Nosebag. Venez, monsieur, vous et moi nous appartenons à l’armée, et nous forcerons ce coquin à se souvenir de ses devoirs. »

Waverley, avec des sentiments qu’il est plus facile de concevoir que de décrire, se vit obligé de suivre cet illustre général femelle. Le brave militaire ressemblait à un mouton autant que cela est possible à un brigadier de dragons ivre, haut de six pieds environ, avec de larges épaules, des jambes grêles, sans parler d’une grande balafre sur le nez. Mistriss Nosebag l’interpella en proférant un jurement, et lui ordonna de faire son devoir. « Vous êtes une damnée,… » commença à répondre le vaillant cavalier ; mais levant les yeux pour donner, par le geste, plus de force à ses paroles, et aussi pour faire suivre l’épithète d’un substantif approprié à la personne qui lui parlait, il reconnut mistriss Nosebag, la salua militairement et prit sur-le-champ un autre ton. « Que Dieu bénisse votre charmante figure, madame Nosebag ; c’est donc vous ? Si un pauvre diable se trouve avoir bu un verre d’eau-de-vie dès le matin, c’est à qui lui fera de la peine à cause de cela. » — « Bien, méchant garnement, bien ; allons, remplissez votre devoir. Ce gentilhomme et moi appartenons à l’année ; mais faites attention à ce vilain merle, à ce chapeau rabattu sur le nez, qui occupe un des coins de la diligence. Je crois que c’est un rebelle déguisé ! »