Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/391

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vieille tour tombât sur la tête des imbéciles qui l’attaquent et des lâches qui la défendent ! Je vois, Waverley, que vous me prenez pour un fou : retirez-vous, Evan, mais ne vous éloignez pas. »

« Le colonel est dans une grande agitation, dit mistriss Flockhart à Evan, lorsqu’il fut descendu ; je voudrais qu’il se calmât. Les veines de son front étaient grosses comme la corde d’un fouet. N’aurait-il pas besoin de prendre quelque chose ? »

« Ordinairement on le saigne, quand il a de ces accès, » répondit le vieux Highlandais[1] avec un sang-froid parfait.

Quand l’enseigne eut quitté l’appartement, le chef reprit par degrés un peu de calme. » Je sais, Waverley, dit-il, que le colonel Talbot vous fait maudire dix fois par jour le moment où vous êtes entré au service de cette cause : ne vous en défendez pas ; car je suis tenté, à cette heure, de maudire celui où j’y suis entré moi-même. Le croiriez-vous ? j’ai fait ce matin deux demandes au prince, et il les a rejetées toutes les deux ! que pensez-vous de cela ?

« Qu’en puis-je penser ? répondit Waverley, jusqu’à ce que vous m’ayez dit quelles étaient ces demandes ? » — « Comment ? que voulez-vous dire ? Je vous répète que c’est moi qui les lui avais faites : moi, à qui il doit trois fois plus qu’à aucun des chefs qui sont réunis autour de son étendard ; car c’est moi qui ai préparé par mes négociations toute l’insurrection, c’est moi qui ai levé des hommes dans le Perthshire, quand pas un d’entre eux n’osait remuer. Je ne suis pas homme, j’imagine, à demander des choses déraisonnables ; et si j’en demandais, il faudrait encore y réfléchir à deux fois avant de me les refuser. Mais vous saurez tout, maintenant que je commence à pouvoir un peu respirer. Vous vous souvenez de ma patente de comte ; elle me fut délivrée il y a quelques années pour des services rendus à cette époque, et si j’en étais digne alors, il est sûr que par ma conduite postérieure j’ai continué à la mériter, pour ne rien dire de plus. Je vous assure que j’estime cette bagatelle, une couronne de comte, aussi peu que vous pouvez le faire, vous et aucun philosophe sur la terre, car je pense que le chef d’un clan comme celui de Sliochd Mac-Ivor est au-dessus de tous les comtes d’Écosse, pour le rang et ;

  1. Highland ancient, dit le texte, pour désigner un des premiers parents ou officiers du chef de clan. a. m.