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combats. Il faut penser seulement à votre épée et à la personne qui vous l’a donnée : toute autre réflexion vient trop tard. »

Avec l’opiat[1] que renfermait cette réponse sans réplique, Waverley chercha à calmer le tumulte de son esprit agité. Le chef et lui, réunissant leurs plaids, se firent un lit chaud et passable. Callum s’assit à leur chevet, car il était chargé spécialement de veiller sur la personne du chef, et commença une longue et triste chanson gaélique sur un ton bas et uniforme, qui, semblable au murmure d’un vent lointain, les eut bientôt endormis.


CHAPITRE XLVII.

LA BATAILLE.


Fergus et son ami avaient à peine dormi quelques heures, lorsqu’ils furent éveillés et mandés auprès du prince. Ils s’y rendaient au plus vite quand l’horloge d’un village éloigné sonna trois heures. Le prince était déjà entouré de ses principaux officiers et des chefs des clans. Un sac de cosses de pois[2] qui venait de lui servir de lit, lui tenait alors lieu de siège. Au moment où Fergus entra dans le cercle, la délibération finissait. « Courage, mes braves amis ! dit le Chevalier, et que chacun se mette aussitôt à la tête de son régiment ; un fidèle ami m’a offert de nous conduire par une route praticable, quoique étroite et détournée, qui traverse à notre

  1. Expression du texte. a. m.
  2. Le fidèle ami qui indiqua le passage par lequel les Highlandais se rendirent de Tranent à Sealon, était un jeune gentilhomme qui possédait des terres dans le Lothian de l’est. Il avait été interrogé par Lord George Murray sur la possibilité de traverser les landes sauvages et marécageuses qui séparaient les deux armées, et il avait répondu qu’elles étaient impraticables. Quand il fut congédié, il se ressouvint qu’il y avait un sentier détourné qui à travers les marais conduisait vers l’est dans la plaine, et que par ce sentier les Highlandais pourraient tourner et prendre en flanc la position sans être exposés au feu de l’ennemi. Il retourna donc vers lord George, qui reçut ces renseignements avec la plus vive gratitude et à l’instant même éveilla le prince Charles, qui dormait à la belle étoile, une botte de vesce pour oreiller. Le jeune aventurier apprit avec la joie la plus grande qu’il lui serait possible de forcer une armée parfaitement équipée à engager une bataille décisive avec ses troupes irrégulières. Son allégresse en cette occasion ne s’accorde pas avec le reproche de lâcheté dirigé contre lui par le chevalier Johnston, un de ses partisans mécontents ; dont les mémoires tiennent autant du roman que de l’histoire. Le chevalier Johnston place le prince à cinquante pas du front de la bataille, position que n’aurait pas choisie un homme qui eût craint d’en partager les périls. À moins que les chefs n’eussent consenti à la proposition du prince, de conduire en personne l’avant-garde, il ne pouvait jouer un rôle plus actif dans l’action.