Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/342

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semblaient avoir toute la souplesse nécessaire pour exécuter les manœuvres. Leurs mouvements paraissaient irréfléchis et confus, mais bientôt régnèrent l’ordre et la régularité ; un général eût loué la bonne tenue des rangs, mais un instructeur eût tourné en ridicule la manière dont on les avait pris.

L’espèce de confusion occasionnée par l’empressement que mettaient les divers clans à se ranger sous leur bannière respective, pour se mettre en marche, offrait un spectacle plein de vie. Point de tentes à plier ; presque tous et par goût dormaient à la belle étoile ; pourtant l’automne s’avançait, et les nuits devenaient froides. Pendant quelques minutes, tandis qu’on prenait les rangs, ce fut un mélange incertain, vague et confus, de tartans ondoyants, de plumes flottantes, de bannières déployant la fière devise des Clanronald, Ganion Coheriga ! contredise qui l’ose !) ; Loch-Sloy, mot d’ordre de Mac-Farlane ; Forth, fortune, and fill the fetters, cri de guerre du marquis de Tullibardine ; Bydand, celui de lord Louis Gordon ; et toutes les devises, tous les emblèmes des autres chefs et de leurs clans.

Enfin la multitude, après s’être long-temps agitée, se rangea sur une longue colonne étroite et brunâtre qui s’étendait dans toute la vallée. Au centre de cette colonne flottait l’étendard du Chevalier, avec une croix rouge sur un fond blanc et ces mots : Tandem triumphans. La cavalerie peu nombreuse, composée des nobles des basses terres avec leurs domestiques et leurs vassaux, formait l’avant-garde : et leurs drapeaux, beaucoup trop nombreux pour un si petit corps, ondulaient à l’extrémité de l’horizon. Plusieurs de ces cavaliers, parmi lesquels Waverley remarqua par hasard Balmawhapple et son lieutenant Jinker (qui tous deux pourtant, avec quelques autres, avaient été mis, d’après les conseils du baron de Bradwardine, au rang de ce qu’il appelait les officiers de réforme), ajoutaient à la vie, sinon à la régularité du tableau, en galopant aussi vite que la foule pouvait le permettre, pour s’aller mettre à l’avant-garde. Les enchantements des Circés de Kligh, et la ribote obligée qu’ils avaient prolongée toute la nuit, avaient sans doute retenu ces héros dans les murs d’Édimbourg un peu trop tard pour qu’ils fussent à leur poste dès la pointe du jour. Les plus prudents de ces traîneurs prenaient pour retourner à leurs rangs un chemin plus long, plus détourné, mais aussi plus découvert, passant à quelque distance de l’infanterie, et galopant à travers les enclos, sur la droite, au risque de