Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/289

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d’un pistolet qui, d’après leur tournure antique, pouvaient avoir vu la déroute de Pentland ou de Bothwell-Bridge[1].

Quand il fût à quelques pas du major Melville, il le salua en touchant gravement mais légèrement son grand bonnet bleu à petit bord, pour rendre la pareille au major qui avait poliment ôté un petit chapeau triangulaire tout bordé d’or. Waverley ne put alors s’empêcher de croire qu’il voyait un chef des têtes-rondes d’autrefois en conférence avec un capitaine de Marlborough.

La troupe d’environ trente hommes qui suivait cet honnête commandant ne portait pas d’uniforme : leur habillement était celui des habitants des basses terres, et ce costume de différentes couleurs, contrastant avec leurs armes, leur donnait un air d’indiscipline et de sédition ; tant les yeux sont habitués à associer l’uniformité d’équipement au caractère militaire. Sur la première ligne étaient ceux qui sans doute partageaient l’enthousiasme de leur chef, gens qu’il n’eût pas été bon à coup sûr de rencontrer dans un combat où leur courage naturel eût été exalté par le fanatisme religieux. D’autres se pavanaient, tout fiers de porter des armes et de la nouveauté de leur situation, pendant que les derniers, fatigués sans doute de leur marche, se tournaient nonchalamment ou s’écartaient de leurs compagnons pour s’aller rafraîchir dans les chaumières et dans les cabarets du voisinage. Six grenadiers de Ligonier, pensa le major en se rappelant sa vie militaire, auraient envoyé tous ces gaillards-là au diable.

Toutefois, s’adressant avec politesse à M. Gilfillan, il lui demanda s’il avait reçu la lettre qu’il lui avait écrite, et s’il pouvait, comme il l’en avait prié, se charger de conduire un prisonnier d’état jusqu’au château de Stirling. « Oui, » fut la seule réponse du chef caméronien, et encore d’une voix qui semblait sortir des penetralia[2] mêmes.

« Mais votre escorte, monsieur Gilfillan, n’est pas si forte que je le croyais, » dit le major Melville. — « Quelques-uns de mes hommes ont eu faim et soif pendant la route et se sont arrêtés pour rafraîchir leurs pauvres âmes avec la parole. » — « Je suis fâché, monsieur, que vous n’ayez pas cru trouver des rafraîchissements pour vos hommes à Cairnvreckan ; tout ce que renferme

  1. Voyez le Vieillard des Tombeaux"", où il en est plusieurs fois question. a. m.
  2. Du fond des entrailles. a. m.