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Le chef, en habile politique, avait eu plusieurs raisons évidentes pour désirer mettre l’exemple de ce jeune héros sous les yeux de Waverley, dont le caractère romanesque avait un tel rapport avec lui. Cependant sa lettre roulait principalement sur quelques commissions insignifiantes que Waverley devait remplir pour lui en Angleterre, et ce ne fut que vers la fin qu’Édouard y trouva ces mots : « Je garde rancune à Flora de ce qu’elle nous a privés hier de sa compagnie ; et pour en tirer vengeance, puisque je suis obligé de vous faire lire ceci afin de vous rappeler votre promesse de m’envoyer de Londres la ligne à pêcher et l’arbalète que vous m’avez promises, j’y joindrai ses vers sur la mort de Wogan. Je sais que cela la contrariera ; car, à vous parler franchement, je la crois plus amoureuse de la mémoire du héros défunt qu’elle ne le sera probablement jamais d’aucun vivant, à moins qu’il ne marche sur ses traces. Mais les gentilshommes anglais de nos jours gardent leurs chênes pour en orner leurs parcs remplis de daims, s’en servent quelquefois pour réparer les pertes qu’ils ont faites au jeu, et ne les invoquent ni pour ceindre leur tête, ni pour ombrager leur tombeau. Permettez-moi, cependant, d’espérer qu’il se trouvera parmi eux une brillante exception dans la personne d’un ami bien cher, auquel je serais heureux de pouvoir donner un titre encore plus doux. »

Les vers portaient le titre suivant :


À UN CHÊNE.


Du cimetière de…, dans les hautes terres d’Écosse, et qui, dit-on, marque la tombe du capitaine Wogan, mort en 1649.


Emblème glorieux de la vieille Angleterre,
Étends avec fierté tes rameaux imposants
Sur la tombe où sommeille, au matin de ses ans,
Un serviteur fidèle, un vaillant militaire.

Du brave heureux modèle, habitant du cercueil,
Ne va point murmurer si ce climat dénie
À la terre où tu dors les fleurs qu’avec orgueil
Aux regards du soleil offre une autre patrie.

Le printemps les fait naître, et l’été les flétrit ;
Elles ont disparu lorsque l’hiver commence.
Ainsi donc quand chacune et se fane et périt,
Leur destin est pareil à la courte existence.

Ton âme infatigable, aux tempêtes du sort
S’opposa plus ardente, et plus haute et plus forte ;
Et quand le désespoir des autres fut l’escorte,
Tu pris ton vol brillant qu’a suspendu la mort.