Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/241

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manquèrent. Flora n’avait pas prononcé un mot qui ne justifiât son attachement ; car même dans l’exaltation et l’enthousiasme de ses principes de loyauté, il y avait une générosité et une noblesse qui lui faisaient dédaigner de servir la cause à laquelle elle s’était dévouée, par des moyens que la délicatesse la plus susceptible n’approuverait pas.

Après avoir suivi le sentier pendant quelques moments en silence, Flora reprit la conversation. « Encore un mot, M. Waverley, avant que nous abandonnions pour jamais ce sujet ; et pardonnez, je vous prie, ma hardiesse, si ce mot ressemble à un conseil. Mon frère Fergus désire ardemment que vous vous joigniez à l’entreprise qui se prépare. Mais, je vous en conjure, n’y consentez point. Vos efforts seuls ne suffiraient pas pour en assurer le succès, et vous partageriez inévitablement sa perte si la volonté de Dieu est qu’il y doive succomber. Laissez-moi vous prier de retourner dans votre pays ; et, vous étant affranchi de tous les liens qui vous attachaient au gouvernement usurpateur, j’espère que vous profiterez de la première occasion de servir utilement votre souverain légitime et si long-temps outragé, et qu’ainsi que vos fidèles ancêtres vous vous montrerez, à la tête de vos vassaux et de vos adhérents, comme un digne représentant de la famille de Waverley. » — « Et si j’avais le bonheur de me distinguer en pareil cas, pourrais-je espérer… ? »

« Excusez-moi de vous interrompre, dit Flora : il n’y a que le moment présent qui soit à nous, et je ne puis que vous exposer avec franchise les sentiments qui m’animent maintenant. Il serait inutile de faire des conjectures sur le changement que pourrait y apporter un concours d’événements trop favorables pour oser même en concevoir l’espérance. Croyez seulement, M. Waverley, qu’après mon frère, il n’y a pas d’homme pour le bonheur et la gloire duquel je formerai des vœux plus sincères. »

Elle le quitta en achevant ces mots, car ils étaient arrivés à l’endroit où le sentier était croisé par un autre. Waverley rentra au château, en proie à mille passions tumultueuses. Il évita de se trouver seul avec Fergus, ne se sentant disposé ni à soutenir ses railleries, ni à répondre à ses sollicitations. La gaieté bruyante du festin (car Mac-Ivor tenait table ouverte pour son clan) servit en quelque sorte à étourdir la réflexion. Quand la fête fut terminée, il commença à réfléchir de quelle manière il reverrait désormais miss Mac-Ivor après la pénible et intéressante entrevue qu’ils