Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/239

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tant ils sont différents de ceux qu’on attribue généralement aux jeunes personnes de mon âge, et je n’ose pas davantage parler de ceux que je vous suppose, dans la crainte de vous blesser en cherchant à vous offrir quelque consolation. Quant à moi, depuis mon enfance jusqu’à ce jour, je n’ai eu qu’un vœu, c’est de voir les souverains qui furent mes bienfaiteurs replacés sur leur trône légitime. Il est impossible de vous exprimer à quel point je porte le dévouement sur ce sujet ; j’avouerai franchement qu’il a absorbé toutes mes pensées, au point que je n’en eus jamais une seule à donner à ce qu’on appelle mon établissement dans le monde. Que je vive assez pour voir cette heureuse restauration, et peu m’importe que j’habite une chaumière dans les montagnes, un couvent en France, ou un palais en Angleterre. » — « Mais, chère Flora, comment l’enthousiasme de votre zèle pour la famille exilée serait-il incompatible avec mon bonheur ? » — « Parce que vous cherchez, ou devez chercher dans l’objet de votre attachement, un cœur qui ne se plaise qu’à augmenter votre bonheur domestique et à vous rendre votre affection avec toute l’ardeur qui puisse réaliser l’exaltation de vos idées. Un homme d’une sensibilité moins vive, avec une tête plus froide, une âme moins tendre, pourrait peut-être se contenter des sentiments de Flora Mac-Ivor ; car une fois engagée par des serments irrévocables, elle ne s’écarterait jamais des devoirs qu’elle aurait juré de remplir. » — « Et pourquoi, pourquoi, miss Mac-Ivor, croiriez-vous devoir faire plutôt le bonheur d’un homme qui serait moins capable de vous aimer et de vous apprécier que moi ? » — « Seulement parce que nos sentiments seraient plus en harmonie, et que sa sensibilité, moins exigeante, n’attendrait pas de moi une passion que je ne pourrais lui accorder. Mais vous, monsieur Waverley, vous auriez toujours devant les yeux le tableau du bonheur domestique tel qu’une imagination comme la vôtre a pu le tracer, et tout ce qui ne réaliserait pas l’idéal que vous vous en êtes fait, serait pris par vous pour de la froideur et de l’indifférence ; et vous pourriez considérer l’attachement que je porte à la famille royale comme un vol fait aux affections que vous auriez droit d’attendre de moi. »

« C’est-à-dire, miss Mac-Ivor, qu’il vous est impossible de m’aimer ? » reprit le jeune homme avec une profonde tristesse. — « Je puis vous estimer, monsieur Waverley, autant et plus peut-être qu’aucun homme que j’aie jamais connu. Mais je ne