Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/232

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Waverley, quoique un peu alarmé par la pensée de prendre des couleurs qui étaient un signe de rébellion pour la majorité du royaume, ne put cependant cacher le chagrin qu’il éprouvait de la froideur avec laquelle Flora avait accueilli les paroles de son frère. « Je m’aperçois, dit-il avec un peu d’amertume, que miss Mac-Ivor trouve le chevalier indigne de ses encouragements et de ses bontés. »

« Non pas, monsieur Waverley, dit-elle avec une grande douceur ; et pourquoi refuserais-je au digne ami de mon frère un don que j’ai distribué à tout son clan ? Je me trouverais heureuse d’enrôler tous les gens d’honneur sous les bannières auxquelles mon frère s’est dévoué. Mais Fergus a pris son parti avec connaissance de cause ; depuis le berceau son existence a été consacrée à son roi ; l’appel qu’il fait à son cœur est tellement sacré pour lui, qu’il y obéirait, dût-il le conduire au tombeau. Mais comment puis-je désirer que vous, monsieur Waverley, avec si peu d’expérience du monde, éloigné comme vous l’êtes des parents et des amis dont vous devez respecter l’influence et les conseils, vous vous laissiez emporter, par un premier mouvement de ressentiment et d’indignation, à vous plonger dans une entreprise aussi désespérée ? »

Fergus, qui ne comprenait rien à de pareils scrupules, parcourait l’appartement à grands pas en se mordant les lèvres ; puis il dit en sortant, avec un sourire forcé : « Fort bien, ma sœur, continuez ; je vous laisse remplir votre nouveau rôle de médiatrice entre l’électeur de Hanovre et les sujets de votre souverain légitime, de votre bienfaiteur. »

Il y eut quelques moments d’un silence pénible, qui fut rompu par miss Mac-Ivor. « Mon frère est injuste, dit-elle, et cela vient de ce qu’il ne peut rien supporter de ce qui lui semble contraire à la loyauté de son zèle. »

« Mais ne partagez-vous pas son ardeur ? » demanda Waverley.

« Si je la partage ! répondit Flora ; Dieu sait que la mienne la surpasse encore, s’il est possible. Mais n’étant pas entraînée comme lui dans le tumulte des préparatifs militaires et de tous les détails infinis de l’entreprise actuelle, je ne perds pas de vue une minute les grands principes de justice et de vérité qui doivent lui servir de base, et dont l’observation doit assurer son triomphe. Or, si je ne me trompe, monsieur Waverley, ce serait mal m’y conformer que de profiter de votre exaltation passagère pour