Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/226

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christianisme n’autorisent pas dans les erreurs où peuvent conduire la jeunesse et l’inexpérience ; et comme cette indulgence ne produit aucun effet salutaire, je suis forcé, bien malgré moi, dans la crise actuelle, d’employer le seul remède qui soit en mon pouvoir. Recevez donc, par celle-ci, l’ordre de vous rendre à……, quartier général de votre régiment, sous trois jours, à partir de celui de la date de cette lettre. Si vous y manquiez, je me verrais contraint de faire mon rapport au bureau de la guerre, en vous déclarant absent sans permission, et je prendrais d’autres mesures qui vous seraient aussi désagréables qu’à moi.

Je suis, monsieur,
Votre obéissant serviteur,
Gardiner,
lieutenant-colonel, commandant le… régiment de dragons.


Le sang d’Édouard bouillonnait dans ses veines en lisant cette lettre. Il avait été habitué dès son enfance à être maître en grande partie de son temps, et par ce moyen il avait pris des habitudes qui faisaient que les règles de la discipline militaire lui étaient aussi insupportables en ce point qu’en beaucoup d’autres. L’idée qu’on serait moins sévère pour lui s’était, dès le principe, emparée de lui, et jusque-là cette opinion avait été confirmée par l’indulgence de son lieutenant-colonel. Ensuite il ne s’était rien passé, à sa connaissance, qui eût pu engager son officier commandant, sauf les avertissements dont nous avons parlé à la fin du quatorzième chapitre, à prendre tout à coup un ton si dur, et, selon Édouard, une autorité si impérieuse. Réunissant ce fait aux lettres qu’il venait de recevoir de sa famille, il ne put que supposer qu’on avait l’intention de lui faire sentir, dans sa situation actuelle, la même dureté de pouvoir dont on avait usé envers son père, et que le tout était un plan concerté pour tracasser et avilir la famille de Waverley.

Aussi, Édouard, sur-le-champ, écrivit quelques lignes assez froides, dans lesquelles il remerciait son lieutenant-colonel de ses bontés passées, et exprimait son regret qu’il eut cherché à en effacer le souvenir en prenant avec lui un ton différent. Le style de cette lettre, joint à ce que lui, Édouard, considérait comme son devoir, dans la crise actuelle, l’obligeait, disait-il, à remettre sa commission. Il envoyait donc la résignation formelle d’un poste qui assujettissait à une correspondance aussi désagréable,