Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/225

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considérait la disgrâce de son frère Richard comme la juste récompense de sa renonciation à son serment de fidélité envers un souverain légitime, en prêtant un serment nouveau à un étranger ; concession que son grand-père, sir Nigel Waverley, avait refusée, soit au parlement des têtes-rondes, soit à Cromwell, quand sa vie et sa fortune étaient également menacées. Elle espérait que son cher Édouard suivrait les traces de ses ancêtres, et se débarrasserait le plus tôt possible de son lien de servitude envers une famille usurpatrice, et qu’il envisagerait les injures faites à son père comme un avis du ciel, et que toute désertion du sentier de la loyauté amène son propre châtiment. Elle terminait aussi en présentant ses respects à M. Bradwardine, et priait Waverley de lui dire si sa fille, miss Rose, était assez âgée pour porter une paire de très-belles boucles d’oreilles qu’elle se proposait de lui envoyer comme gage de son affection. La bonne dame demandait également si M. Bradwardine prenait toujours autant de tabac écossais, et était aussi infatigable à la danse qu’il l’avait été dans le manoir de Waverley, trente ans auparavant.

Ces lettres, ainsi qu’on doit s’y attendre, excitèrent vivement l’indignation de Waverley. D’après le genre irrégulier de ses études, il n’avait pas une opinion politique assez fixe pour contenir le ressentiment que lui faisaient éprouver les injures supposées de son père. Édouard ignorait totalement la cause réelle de sa disgrâce ; et ses habitudes ne l’avaient jamais porté à examiner la politique de son siècle, ni les intrigues dont son père s’occupait avec activité. Toute impression qu’il eût adoptée relativement aux partis de ce temps était même, par rapport à la société dans laquelle il se trouvait à Waverley-Honour, plutôt défavorable au gouvernement et à la dynastie régnante. Il partagea donc, sans hésiter, le ressentiment de ses parents qui avaient bien droit de diriger sa conduite ; et cette détermination lui coûta peut-être d’autant moins, qu’il se rappelait l’ennui de son quartier et le peu de figure qu’il faisait parmi les officiers de son régiment. S’il lui fût resté quelques doutes, il se serait décidé d’après la lettre suivante de son officier commandant. Comme elle est très-courte, nous l’insérons en entier :

Monsieur,

Ayant porté un peu au-delà de la ligne de mon devoir une indulgence que les lumières de la nature, et encore plus celles du