Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/216

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fois de pourpoint et de haut de chausses[1]. Il observa beaucoup de cérémonies en s’approchant d’Édouard, et quoique notre héros fût torturé par la douleur, il ne voulut commencer aucune opération qui aurait pu le soulager, avant d’avoir fait trois fois le tour de son lit, marchant de l’est à l’ouest, selon la direction du soleil. Cette cérémonie, qu’on appelait faire le deasil[2], paraissait être regardée par le médecin et par les spectateurs comme une opération de la plus haute importance pour la guérison ; et Waverley, que la douleur rendait incapable de faire des remontrances, et qui dans le fait ne voyait pas de chance d’être écouté, s’y soumit en silence.

Dès que cette cérémonie fut convenablement accomplie, le vieil esculape saigna son malade avec un verre à ventouse, en faisant preuve de la plus grande dextérité, et continua, tout en marmottant sans cesse en gaëlique, à faire bouillir certaines herbes dont il composa un liniment ; ensuite il fomenta les parties blessées, ne manquant jamais de murmurer des prières ou des charmes : c’est ce que Waverley ne put distinguer, son oreille n’ayant pu saisir que les mots Gasper, Melchior, Balthazar, Max, Prax, Fax, et autre galimatias semblable. La fomentation eut un prompt effet, calma la douleur, et fit diminuer le gonflement ; ce que notre héros attribua à la vertu des herbes ou à l’effet de la chaleur, tandis que tous les assistants l’attribuèrent au charme qui avait accompagné l’opération. On apprit alors à Édouard que pas une des herbes n’avait été cueillie hors le temps de la pleine lune, et que le médecin avait, tout en les cueillant, récité uniformément un charme, qui se traduirait ainsi :


Je te salue, herbage heureux
Et qui croissait en terre sainte ;
Au mont Olivet si fameux
Tu fus jadis ravi sans crainte.
Tu peux guérir bien plus d’un mal
Et bien plus d’une meurtrissure ;
Tu guéris plus d’une blessure :
Oui ton pouvoir n’a pas d’égal
Au nom sacré de Notre Dame,

  1. Ce vêtement, qui ressemblait à celui qu’on met souvent aux enfants en Écosse, et qu’on appelle polonie (polonaise), est une modification très-ancienne de l’habillement montagnard. Ce n’était, dans le fait, que le haubert ou la cotte de mailles, fait de toile au lieu d’anneaux d’une armure. a. m.
  2. Les vieux montagnards font encore le deasil, dit l’auteur, autour de ceux à qui ils veulent du bien. Tourner autour d’une personne en sens opposé, ou wither shins (allemand, wider shins) est considéré comme malencontreux, et même une espèce d’enchantement. a. m.