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crut par degrés en volume et en éclat, et semblait un météore qui s’élève au-dessus de l’horizon. Tandis qu’Édouard observait ce phénomène, il crut entendre dans le lointain comme un bruit de rames. Le bruit augmentait à chaque instant, et un coup de sifflet arriva à son oreille dans la même direction. L’homme à la hache d’armes répondit aussitôt à ce signal de la même manière, et bientôt un bateau, conduit par quatre ou cinq Highlandais, entra dans une petite anse, près de laquelle Édouard était assis ; il se leva avec son compagnon pour aller au-devant de deux vigoureux montagnards, qui le portèrent officieusement dans le bateau, où il ne fut pas plus tôt assis, que l’on reprit les rames, et que l’on se mit à fendre les eaux du lac avec une grande rapidité.


CHAPITRE XVII.

DEMEURE D’UN VOLEUR HIGHLANDAIS.


Un profond silence régnait dans le bateau, où l’on n’entendait que le bruit d’une chanson gaëlique, que l’homme placé au gouvernail chantait à voix basse, et dont la cadence monotone semblait régler le mouvement des rames. La clarté dont on approchait de plus en plus présentait par degrés un foyer plus vaste et un plus grand éclat. On voyait que c’était un grand feu ; mais Édouard ne pouvait distinguer s’il était allumé dans une île ou en terre ferme. La surface limpide du lac reproduisait cette masse éclatante de lumière, et Édouard croyait voir le char de feu dans lequel le génie du mal d’un conte oriental parcourt la terre et l’onde. Quand ils furent plus près, Waverley put reconnaître, à la lumière du feu, qu’il était au pied d’un roc escarpé et sauvage, qui s’élevait sur le bord de l’eau. Le front de ce roc, que la réverbération colorait d’un rouge sombre, formait un contraste étrange et même effrayant avec les sables voisins, qui de temps en temps et en partie étaient éclairés par la pâle lumière de la lune.

Le bateau touchait au rivage, et Édouard vit que ce grand feu était amplement alimenté avec des branches de pin par deux hommes qui, dans les reflets de la flamme, avaient l’air de deux démons ; qu’ils étaient placés devant l’ouverture d’une grande caverne dans laquelle l’eau du lac semblait entrer ; et il conjectura avec raison que le feu avait été allumé pour servir de phare aux bateliers à leur retour.