Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/151

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triotes se préparer à soutenir l’assaut. Toute chose nouvelle, heureuse ou malheureuse, mettait ses esprits en mouvement, il sautait, cabriolait, dansait, et chantait le refrain d’une vieille ballade :


« Notre richesse est partie ! »


Mais venant à passer trop près du bailli, il reçut de son fouet un avertissement qui convertit ses chants en pleurs.

Waverley, en se dirigeant vers le jardin, vit le baron en personne qui arpentait et réarpentait la longueur de la terrasse, avec des enjambées rapides et effrayantes ; son front semblait couvert d’un nuage d’orgueil blessé et d’indignation, et toute sa démarche paraissait annoncer que toute question lui serait pénible, si même elle ne le blesserait pas. C’est pourquoi Waverley rentra dans la maison sans lui parler, et se rendit à la salle à manger, où il trouva sa jeune amie Rose, qui, sans montrer la fureur de son père, l’importance affairée du bailli Mac Wheeble, ni le désespoir des laitières, paraissait chagrine et pensive. Un seul mot apprit tout à Édouard. « Votre déjeuner, dit-elle, capitaine Waverley, sera un peu moins tranquille qu’à l’ordinaire. Une bande de Caterans est descendue cette nuit, et nous a enlevé toutes nos vaches à lait. » — « Une bande de Caterans ? » — « Oui, des voleurs des montagnes voisines. Nous étions à l’abri de leurs pillages par le black-mail que nous payions à Fergus Mac Ivor Vich-Jan-Vohr ; mais mon père a pensé qu’il était indigne d’un homme comme lui de payer plus long-temps un pareil tribut ; il s’en est affranchi, et vous voyez ce qu’il en est résulté ! Ce n’est pas la valeur de notre perte qui m’afflige, capitaine Waverley ; mais mon père est si indigné de cet affront, il est si vif et si bouillant, que je crains qu’il ne veuille tenter de recouvrer ses vaches par la force ; que, s’il n’est pas blessé lui-même, il ne blesse quelques-uns de ces hommes sauvages ; et alors plus de paix entre eus et nous, peut-être pour la vie. Nous ne pouvons d’ailleurs nous défendre comme autrefois, le gouvernement nous ayant pris toutes nos armes ; et mon respectable père est si téméraire ! Grand Dieu, qu’arrivera-t-il ? »

La pauvre Rose n’eut pas la force d’en dire davantage, et elle répandit un torrent de larmes. Le baron entra dans ce moment, et parla à sa fille avec une dureté que Waverley ne lui avait encore vue avec personne. « Vous rougiriez, lui dit-il, de paraître