Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/135

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Et dont les verdoyants attraits
Sauront couronner notre attente. »


Ces vers, miss Bradwardine, appartiennent-ils à l’ancienne poésie d’Écosse ? » demanda Waverley.

« Je ne pense pas, répondit-elle ; cette pauvre créature avait un frère, et le ciel, pour dédommager sans doute la famille de l’infirmité de Davie, lui avait départi un talent très-extraordinaire, au dire des gens du village. Un oncle le fit élever pour l’église d’Écosse, mais il ne put obtenir d’être ministre, parce qu’il sortait de nos domaines. Il revint du collège sans espoir et le cœur brisé, et tomba en langueur ; mon père en prit soin jusqu’à sa mort, qui arriva lorsqu’il n’avait pas encore atteint sa dix-neuvième année ; il jouait de la flûte d’une manière remarquable, et on lui accordait les plus heureuses dispositions pour la poésie ; il aimait et plaignait son frère, qui le suivait comme son ombre, et nous pensons que c’est de lui que viennent ces chansons et ces airs qui ne ressemblent en rien aux chansons et aux airs de notre pays. Si on lui demande qui lui a appris ces fragments que vous venez d’entendre, ou d’autres semblables, il ne répond que par de longs et bruyants éclats de rire, ou par des sanglots et des larmes ; il n’a jamais donné d’autre explication, et jamais on ne lui a entendu prononcer le nom de son frère depuis sa mort. »

« Probablement, répondit Édouard, intéressé vivement par cette histoire un peu romanesque ; probablement on pourrait en savoir davantage en l’interrogeant avec un soin particulier. »

« Peut-être bien, dit Rose ; mais mon père n’a jamais voulu permettre à personne de le questionner à cet égard. »

Pendant qu’ils causaient ainsi, le baron, à l’aide de M. Saunderson, avait mis une paire de grosses bottes ; il invita alors notre héros à le suivre, et il descendit le large escalier du perron, en frappant du pied, en donnant sur la grossière balustrade des coups du manche de son fouet de cheval, et fredonnant avec l’air d’un chasseur de Louis XIV ces vers :


Pour la chasse ordonnée
Il faut préparer tout.
Holà ! vite, debout !
Et commençons bien la journée.