Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/109

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n’était pas d’une mince ressource pour un laird écossais d’alors, dont le revenu s’augmentait par les impôts levés sur les fermes par les fourrageurs ailés, et par la conscription à laquelle ils étaient soumis au profit de sa table.

Dans un autre coin de la cour était une fontaine où un ours en pierre dominait sur un large bassin pavé dans lequel il vomissait de l’eau. Cette œuvre de l’art était la merveille de la contrée à dix lieues à la ronde. Il ne faut pas oublier que des ours de toutes sortes, petits et grands, des demi-ours, des ours entiers, ornaient les fenêtres, les pignons, terminaient les gouttières et supportaient les tourelles, avec l’ancienne devise de la famille, écrite en caractères gothiques : Prenez garde à l’ours !

La cour était vaste, bien pavée et très-propre, parce que vraisemblablement il y avait une autre issue affectée aux étables dont on se servait pour emporter la litière. Tout semblait solitaire et silencieux dans ce lieu, où l’on n’entendait que le bruit de la fontaine, et maintenait Waverley dans l’idée qu’il entrait dans un monastère. Nous demandons permission au lecteur de terminer ici un chapitre consacré à peindre une nature sans mouvement[1].


CHAPITRE IX.

ENCORE QUELQUES DÉTAILS SUR LA RÉSIDENCE ET SES ALENTOURS.


Après avoir satisfait sa curiosité en regardant autour de lui pendant quelques minutes, Waverley ébranla le marteau massif de la porte principale, dont l’architrave portail la date 1594. Mais on ne lui fit aucune réponse, quoique le coup de marteau retentît dans la plupart des appartements et fût répété par l’écho des murailles de la cour ; bruit qui effaroucha les pigeons dans leur vénérable rotonde, éveilla même, malgré la distance, les chiens du village endormis sur leur fumier.

Fatigué de faire tant de bruit pour ne recevoir que des réponses qu’il ne demandait pas, Waverley commença à penser qu’il était comme le prince Arthur entrant vainqueur dans d’Orgoglio.

  1. Sous le nom de Tully-Veolan on n’a décrit aucun manoir particulier, observe l’auteur anglais, mais, ajoute-t-il, on a rassemblé dans cette description des choses partirulières à plusieurs vieux manoirs d’Écosse. Toutefois, la demeure du baron de Bradwardine ne ressemble à aucune autre, pas plus qu’au manoir de Grand-Tully. a. m.