Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/71

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pour la reddition de Garde-Douloureuse. À l’aide de ce haubert et de ce casque, j’ai pu assister à une conférence où il pensait ne trouver aucune oreille anglaise. Ils parlaient flamand, et depuis long-temps je connais ce jargon.

— Le flamand, » répondit avec amertume la jeune fille, que la colère violente qui la dominait portait à répondre d’abord à la dernière injure, « le flamand n’est pas un jargon comme votre vilain anglais, moitié normand, moitié saxon : le flamand est une langue gothique, noble et majestueuse ; elle était parlée jadis par les vaillants guerriers qui combattaient contre les Romains, pendant que les Bretons subissaient honteusement le joug de ces fiers conquérants. Quant à ce qu’on a dit touchant Wilkin Flammock, » continua-t-elle, donnant plus d’ordre à ses idées à mesure qu’elle parlait, n’en croyez rien, ma chère maîtresse ; et si vous êtes fière de l’honneur de votre noble père, fiez-vous à l’honnêteté du mien comme aux saints Évangiles. » Elle prononça ces paroles d’un ton de voix qui semblait implorer la pitié, en poussant des sanglots comme si son cœur eût été sur le point de se briser.

Éveline s’efforça de consoler sa compagne. « Rose, dit-elle, dans ces temps désastreux, l’homme le plus honnête est souvent en butte aux soupçons, et un malentendu peut s’élever entre les meilleurs amis. Écoutons ce que le vénérable moine peut avoir à reprocher à votre père. Ne craignez pas que je refuse d’entendre l’accusé. Je vous croyais plus douce et plus raisonnable.

— Je ne suis ni douce ni raisonnable sur un tel sujet, » dit Rose avec une indignation toujours croissante. « Comment, lady Éveline, pouvez-vous écouter les mensonges de ce révérend masque, qui n’est ni vrai prêtre ni vrai soldat ? Mais je cours chercher quelqu’un qui pourra lui répondre en face, qu’il porte casque ou capuchon. »

À ces mots elle sortit de la chapelle. Profitant de cette absence, le moine, après quelques phrases pédantesques, informa lady Éveline de l’entretien qui avait eu lieu entre Jorworth et Wilkin, et lui proposa de rassembler le peu d’Anglais qui se trouvaient dans le château, de s’emparer de la tour carrée, qui, comme les forteresses gothiques construites du temps de l’occupation de l’Angleterre par les Normands, était placée de manière à pouvoir opposer une vigoureuse défense, même en supposant que les ouvrages extérieurs du château, sur lesquels elle dominait, fussent au pouvoir de l’ennemi.