Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/57

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faut, je ne vois pas le mal qu’il y aurait à cela, car il y a tout lieu de croire que bientôt les vivres nous manqueront.

— Que voulez-vous dire ? » s’écria le moine tressaillant ; « j’espère, au nom de tous les saints, que nous sommes suffisamment pourvus de provisions.

— Pas aussi bien que votre couvent, bon père, » répliqua Wilkin avec le même calme. « Nos festins de Noël, vous le savez, ont été trop abondants, pour que ceux de Pâques leur ressemblent. Les chiens de Gallois qui nous ont aidés à manger tous nos vivres, viendront sans doute à bout d’entrer ici, parce qu’aujourd’hui nous en manquons.

— Vous déraisonnez, Wilkin, répondit le moine ; hier soir encore des ordres furent donnés par feu notre seigneur (dont Dieu veuille avoir l’âme), pour aller dans le pays d’alentour se pourvoir des vivres nécessaires.

— Cela est vrai, mais les Gallois nous serraient de trop près pour nous laisser faire ce matin ce qui eût dû être fait depuis quelques semaines, même depuis quelques mois. Feu notre seigneur, si toutefois il a perdu la vie, était un de ces hommes qui se fient trop sur leur épée, et aujourd’hui nous souffrons de cela. Pour moi, quand il s’agit de combattre, je ne prise rien tant qu’une arbalète et un château bien approvisionné. Mais il me semble que vous pâlissez, mon bon père ; allons, un verre de vin vous ranimera. »

Le moine éloigna le verre que Wilkin le pressait d’accepter avec sa civilité grossière. « Maintenant, dit-il, nous n’avons plus de salut que dans la prière.

— C’est vrai, bon père, répondit l’impassible Flamand ; priez donc autant que vous voudrez. Moi, je me contenterai de jeûner, ce que je serai obligé de faire bon gré mal gré. » En ce moment un cor se fit entendre devant la porte du château. « Allons ! coquins, regardez à la herse et à la porte ! Quelles nouvelles, Neil Hansen ?

— Un envoyé des Gallois vient de s’arrêter à Mill-Hill, à la portée de nos coups ; il tient un drapeau blanc, et demande à entrer.

— Sur ta vie ! ne le laisse pas entrer que nous ne soyons prêts, dit Wilkin. Qu’un mangonneau soit pointé vers l’endroit où il se trouve, et frappez-le s’il ose remuer d’un pas avant que nous soyons tous préparés à le recevoir, » dit Flammock dans sa langue