Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/35

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

non sans lancer un coup d’œil d’indignation à son rival triomphant, qui avait si judicieusement réservé les moyens de son art pour célébrer la guerre, sujet toujours populaire au milieu des Gallois.

Les chefs reprirent leurs places, non plus pour se réjouir, mais pour fixer promptement, ainsi qu’ils en avaient l’usage, le point sur lequel ils devraient assembler leurs forces, qui, dans de telles circonstances, comprenaient tous les hommes en état de porter les armes ; car, excepté les bardes et les prêtres, tous les Gallois étaient soldats. Il fallait aussi qu’ils établissent l’ordre qu’ils suivraient une fois arrivés aux frontières, où ils devaient témoigner par une dévastation générale la part qu’ils prenaient à l’insulte faite à leur prince en n’ayant point égard à sa demande.







CHAPITRE III.

les apprêts du combat.


Les grains de sable qui composent ma vie sont comptés : c’est ici que je dois tomber ; c’est ici que ma vie doit finir.
Shakspeare. Henry V, acte I, scène 4.


En envoyant au prince de Powys l’épître qu’on vient de lire, Raymond Berenger avait prévu le résultat de son refus ; mais il n’en était nullement effrayé. Il envoya des messagers à quelques-uns de ses vassaux, qui tenaient leurs fiefs sous une redevance de carnage ; il les avertit de faire le guet, afin de le prévenir de l’approche de l’ennemi. Ces vassaux, comme on sait, occupaient les tours nombreuses qui, comme autant de nids à faucon, avaient été construites sur les points les plus convenables pour défendre la frontière ; ils étaient tenus d’annoncer au son du cor toute incursion tentée de la part des Gallois. Ces sons, qui se répondaient de tour en tour, de station en station, étaient un signal d’alarme pour se préparer à la défense générale. Mais quoique Raymond, d’après le caractère inconstant et irrésolu de ses voisins, considérât ces précautions comme nécessaires pour soutenir sa réputation de soldat, il était loin de croire le danger imminent ; car les préparatifs des Gallois, quoique plus considérables que jamais, étaient aussi secrets que leur résolution de guerre avait été soudaine.