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patriotes. Enfin les fêtes se terminèrent ; chevaliers et écuyers quittèrent alors le château, qui prit encore une fois l’aspect d’un fort solitaire mais bien gardé.

Le prince du Powys-Land, tout en continuant de chasser sur ses montagnes et dans ses vallées, s’aperçut que l’abondance du gibier, aussi bien que l’absence des chevaliers normands, qui affectaient de le traiter d’égal, n’avaient point pour lui le même charme que la vue de sa légère et belle Éveline suivant la chasse montée sur un palefroi blanc. Enfin, jetant désormais de côté toute hésitation, il mit dans sa confidence son chapelain, homme capable et plein de sagacité. La confiance du maître flatta l’orgueil de ce dernier, qui vit en outre que le but auquel on tendait pourrait profiter à son ordre et à lui-même. Par son conseil, les procédures pour obtenir le divorce de Gwenwyn furent poursuivies sous les plus favorables auspices, et l’infortunée Brengwain fut reléguée dans un cloître : peut-être ce séjour était-il pour elle moins triste et moins monotone que la retraite solitaire où elle s’était vue délaissée par son mari, depuis l’instant où celui-ci avait désespéré de devenir père. Le moine Einion s’adressa aussi aux chefs et aux principaux seigneurs gallois ; il leur représenta les avantages que dans les guerres futures ils seraient sûrs d’obtenir ; une fois maîtres de Garde-Douloureuse, il leur faisait observer que, pendant plus d’un siècle, cette forteresse avait couvert et protégé une étendue de terrain considérable ; qu’elle rendait leurs courses difficiles et leur retraite périlleuse ; qu’en un mot elle les empêchait de pousser leurs incursions jusqu’à Shrewsbury. Quant au mariage avec la damoiselle saxonne, le bon père donna à entendre que les liens que Gwenwyn allait former pourraient n’être pas plus durables que ceux qui l’unissaient à sa précédente épouse, Brengwain.

Ces arguments, liés avec d’autres adaptés aux vues et aux désirs de chacun de ces chefs, eurent un tel succès, qu’au bout de quelques semaines le chapelain put annoncer au prince son maître que l’union projetée n’éprouverait aucune opposition de la part des seigneurs et nobles de ces domaines. Un bracelet d’or du poids de six onces fut la récompense immédiate du prêtre pour la dextérité qu’il avait apportée dans la négociation ; Gwenwyn le chargea même de rédiger les propositions du mariage qui, dans son opinion, allaient jeter dans une extase de joie le château de Garde-Douloureuse, quelque sinistre que fût son