Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/183

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résultat si malheureux, que, semblable à une révolte étouffée, elle ne fit qu’accroître la force de la domination de l’Église. Depuis la soumission du roi, dans cette malheureuse lutte, la voix de Rome avait une double puissance quand on l’entendait, et les pairs les plus hardis de l’Angleterre trouvaient qu’il était plus sage de se soumettre à ses ordres impérieux que de provoquer une censure spirituelle qui avait tant d’influence sur le séculier. Il s’ensuivit que la légèreté et le mépris avec lequel le prélat Baudouin traitait le connétable, jeta dans un étonnement glacial les amis qui étaient réunis pour être témoins des épousailles, et lorsqu’il tourna sur eux son œil impérieux, il vit que plusieurs de ceux qui l’auraient soutenu à la vie, à la mort, en toute autre querelle, eût-elle été contre son souverain, pâlissaient à l’idée d’une querelle avec l’Église. Embarrassé, et en même temps indigné de leur timidité, le connétable se hâta de les congédier, avec l’assurance générale que tout irait bien, que l’indisposition de son neveu était un léger accident exagéré par un médecin pédant, et aggravé par son manque de soin ; et que le message de l’archevêque, remis avec si peu de cérémonie, n’était que la suite d’une familiarité mutuelle et amicale, qui leur faisait quelquefois, par plaisanterie, rejeter ou négliger les formalités sociales les plus ordinaires. « Si j’avais besoin de parler au prélat Baudouin pour une affaire pressante, l’humilité de ce digne pilier de l’Église, et son indifférence pour les formalités sont telles, que je ne craindrais pas de l’offenser, dit le connétable, en lui envoyant le moindre palefrenier de ma troupe pour lui demander audience.

Quoiqu’il parlât ainsi, il y avait quelque chose dans sa physionomie qui démentait ses paroles ; et ses amis et ses parents se retirèrent les yeux baissés et l’âme inquiète, comme s’ils eussent quitté un banquet funéraire.

Randal fut le seul qui, ayant suivi attentivement tous les détails de cette affaire pendant la soirée, osa approcher son cousin au moment où il quittait la maison, et lui demander, « au nom de leur amitié renouvelée, s’il n’avait pas d’ordre à lui donner, » l’assurant avec un regard plus expressif que ses paroles, qu’il ne serait pas froid à le servir.

« Je n’ai rien qui puisse occuper votre zèle, beau cousin, » repartit, le connétable d’un ton qui semblait mettre en doute sa confiance ; et le salut d’adieu dont il accompagna ces mots ne laissa