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pas mieux que d’échanger un honteux assujettissement contre une guerre honorable, quoique désespérée. Les Scots se réunissaient en bandes, en compagnies, et se réfugiant dans les bois, dans les montagnes, dans les marécages, où leurs pères s’étaient défendus contre les Romains, se préparaient à une insurrection générale contre la puissance anglaise.

Si les nobles Scoto-Normands avaient, à la légère, reconnu la suzeraineté d’Édouard, il n’en était pas de même des classes moyenne et inférieure de propriétaires ; car ceux-ci, descendus de la race indigène d’Écosse, partageant le sort du peuple, et animés des mêmes sentiments, brûlaient du désir de se venger des Anglais, que l’usurpation avait rendus possesseurs de leurs forteresses nationales. Dès qu’Édouard et son armée franchirent la frontière, il éclata une multitude de petites insurrections, sans résultat il est vrai, mais assez nombreuses pour indiquer une disposition hostile et belliqueuse qui n’avait besoin que d’un chef pour devenir générales. Elles en trouvèrent un dans sir Guillaume Wallace.

Ce champion de la patrie était Anglo-Normand d’origine, mais ne se distinguait ni par sa naissance ni par sa fortune au point de jouir d’un haut rang et d’immenses richesses, ou de partager pour l’honneur et le bien public la froide indifférence que de tels avantages pouvaient exciter chez leur possesseur. Il était né dans le Ren Irevshire, district de l’ancien royaume de Strath-Clyde, et sa nourrice l’avait peut-être bercé de contes et de chants des bardes Gallois ; car il y a tout lieu de croire que la langue bretonne subsistait encore dans les coins les plus éloignés du pays où elle avait autrefois été universelle. En tout cas, Wallace fut affranchi par son éducation des principes d’intérêt personnel et d’égoïsme qui ne sont que trop naturels à l’air de la cour et surtout que trop défavorables aux nobles idées d’un patriote. Les traditions populaires de l’Écosse, qui se complaisent à parler de ce bien-aimé champion du peuple, représentent Guillaume Wallace comme d’une taille imposante, d’une force et d’une dextérité sans pareilles, et d’une si grande bravoure qu’il ne connut qu’une seule fois, dit-on, et encore subissait-il l’influence d’un pouvoir surnaturel, la sensation de la peur.

On pense que Wallace fut mis hors la loi pour avoir tué un Anglais dans une querelle fortuite. Il se retira dans les bois, s’y entoura d’une bande de gens aussi désespérés que lui, et obtint divers succès dans des escarmouches contre les troupes anglaises.