Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 27, 1838.djvu/69

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur sa tête ; mais Édouard semblait encourager de telles espérances. Tandis que le roi anglais était encore à Berwick, l’abbé d’Aberbrothock vint lui remettre de la part de Baliol une lettre où ce dernier, en réponse à l’ordre d’Édouard, qu’il eût à comparaître en personne, renonçait à son vasselage et envoyait une déclaration de guerre. « L’insensé ! le traître ! s’écria le roi, quelle frénésie le tient ! Mais puisqu’il ne veut pas venir à nous, nous irons à lui. »

Les progrès d’Édouard vers le nord furent arrêtés par la citadelle de Dunbar. Elle était défendue par la comtesse de March qui, quoique le comte, son époux, servît dans l’armée anglaise, s’était jointe aux seigneurs que la cause de l’indépendance comptait parmi ses partisans ; tant les Écossais étaient divisés en une si grave occasion ! Pendant qu’Édouard pressait le siège de cette importante place qu’on peut appeler la deuxième porte de l’Écosse, une nuée de soldats apparut sur le versant de la chaîne des Lammermoor-Hills qui domine la cité. C’était l’armée écossaise qui venait au secours de Dunbar, et à la vue des bannières amies, les assiégés poussèrent un cri de triomphe et de défi. Mais quand Warenne, comte de Surrey, général d’Édouard, alla à la rencontre des Écossais, ceux-ci, avec une témérité qui leur fut souvent fatale avant comme ensuite, se précipitèrent de la position avantageuse qu’ils occupaient, et par leur imprudence essuyèrent une terrible défaite dont le résultat fut d’ouvrir toute la contrée à l’envahisseur.

Bruce s’imagina, après la victoire de Dunbar, que son tour de régner était venu, et confia à Édouard son espoir de remplacer Baliol sur le trône. « N’avons-nous à nous occuper d’autre chose, répartit Édouard, en le regardant de travers, qu’à vous conquérir des royaumes ? » Bruce se retira pour ne plus se mêler des affaires publiques, auxquelles son petit-fils devait, à une époque postérieure, prendre une part si éclatante.

Après la bataille de Dunbar, ce fut à peine si une étincelle de résistance à Édouard parut jaillir du désespoir général. L’armée anglaise continua sans obstacle sa marche vers le nord et s’avança jusqu’à Aberdeen et Elgin. Baliol, amené devant son ennemi, au château de Brechen, eut littéralement son manteau royal déchiré sur lui, confessa avoir commis un crime féodal en se révoltant contre son seigneur suzerain, et fit en règle la reddition de son royaume au vainqueur.