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croisades. Une multitude de ses plus braves barons et chevaliers alla en Palestine et y trouva la mort.

De très amers chagrins fondirent bientôt sur Alexandre III. Sa femme était morte. Son seul fils survivant mourut aussi ; un autre n’avait pas survécu à l’enfance. Il ne lui restait pour postérité que la pucelle de Norwège, sa petite-fille, enfant qui résidait dans un royaume lointain. Pour obvier aux malheurs d’une succession disputée, car c’était encore un homme dans la fleur de l’âge, le monarque écossais épousa en secondes noces Ioleta, fille du comte de Dreux. Peu après le mariage, comme il se hâtait de retourner chez lui et suivait une route rapide le long de la mer, près de Kinghorn, dans le Fife, un roc fit tomber son cheval et cette chute coûta la vie au cavalier.

Les lamentations furent universelles ; il en devait résulter, craignait-on, les conséquences les plus désastreuses :

Pas d’affreuse prédiction
Qui n’eût lieu dans l’occasion
Par les vieillards et par les vieilles.

Thomas-le-Rimeur, poète et prétendu devin, annonça ce qu’on rapporte, sous la métaphore de la tempête la plus terrible que l’Écosse eût jamais vue, les calamités qui devaient fondre sur elle. D’autres rappelèrent un sinistre présage qui eut lieu pendant les fêtes du second mariage d’Alexandre : un spectre, ne représentant ni plus ni moins que la mort, avait terminé une brillante procession de masques et offrant peut-être une ressemblance trop marquée avec un véritable squelette, avait répandu la tristesse et la frayeur parmi les joies et les pompes nuptiales. On prétendit, quand Alexandre mourut, que cette apparition avait présagé dès lors l’horrible calamité qui devait bientôt imposer silence à l’allégresse publique. Les classes inférieures surtout exhalèrent en termes simples, mais touchants, leurs regrets de la perte d’un si excellent prince, déplorant ses vertus et s’épouvantant d’avance des tristes suites de sa mort. Mais ni poète, ni devins, dans leurs moments les plus exaltés et les plus sombres, ne purent prévoir la moitié des maux dont le trépas d’Alexandre devait être suivi dans le royaume qu’il avait gouverné.

Nous allons faire halte à cette remarquable période de l’histoire pour comparer la situation de l’Écosse, en 843, lorsque Kenneth Macalpin forma, pour la première fois, les Pictes et les