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de sûreté, encore plus septentrionale, fut construite dans toute la largeur de l’île, et s’étendit de Caridden, qui est proche Linlithgow sur le golfe de Forth, au golfe de Clyde. Ce dernier boulevard servit à protéger la région comprise entre les Estuaires[1], tandis que les contrées qui se prolongent au-delà furent abandonnées, ou peu s’en faut, à leurs naturels et indépendants propriétaires. Ainsi les Romains eurent deux murailles, dont la plus septentrionale était un rempart extérieur lié par des communications militaires et flanqué de redoutes pour recevoir une première attaque, et la plus méridionale, un retranchement intérieur pour s’y mettre à l’abri en cas de nécessité.

L’existence d’une double ligne de fortification paraît démontrer que vers l’année 140, époque où le boulevard le plus avancé vers le nord fut fini, ce puissant peuple ne possédait rien d’une manière positive au-delà de cette seconde barrière. Il ne faudrait cependant pas douter, à défaut même de routes et de camps qui le prouvassent, que, si les Romains ne purent subjuguer absolument ni les provinces considérables envahies par Agricola dans le comté de Fife, ni dans les districts occidentaux et par-delà le mur d’Antonin, ils les tinrent en respect et en crainte. Camelodunum, ou Camelon, vaste et forte ville, fut fondée par eux, près de Falkirk, pour défendre l’extrémité orientale du mur, et de nombreux forts d’architecture romaine dont il reste des ruines sont placés de manière à fermer les passages qui descendent des Highlands[2]. L’existence de ces forts, et le tracé de routes stratégiques ou de camps qui remontent aux Romains, prouvent aussi le soin qu’ils prenaient pour maintenir sur différents points les communications nécessaires entre les deux murailles, afin que les troupes à qui la garde en était confiée pussent toujours agir de concert et combiner leurs mouvements.

Malgré ces précautions militaires, toute la force de Rome ne put soutenir ses ambitieuses prétentions à la souveraineté de l’île, et en l’année 170, les Romains abandonnèrent la plus septentrionale des deux murailles, qu’Antonin avait bâtie, pour se retirer derrière celle qui avait été érigée cinquante ans auparavant sous les auspices de l’empereur Adrien. Toutefois, ils demeurèrent en possession des forts et des postes établis par eux

  1. Ou bras de mer ; mot tiré du latin Æstuarium. a. m.
  2. Hautes terres ou montagnes d’Écosse. a. m.