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cette unique sœur à laquelle elle s’était attachée par tant de motifs d’affection, était accusée d’infanticide, et qu’elle-même était assignée pour déposer contre elle comme principal témoin. Le conseil de l’accusée dit à Hélène que si elle déclarait que sa sœur avait fait pour ses couches quelques préparatifs, tant petits fussent-ils, ou qu’elle lui avait fait quelque confidence sur son état, une telle déposition sauverait la vie de cette infortunée, parce qu’elle était le principal témoin à charge contre elle. Hélène répondit : « Il m’est impossible de dire une fausseté sous la foi du serment. Quoi qu’il puisse en résulter, je ferai ma déclaration d’après ma conscience. »

« Le jugement eut lieu : la sœur fut déclarée coupable, et condamnée. Mais en Écosse la loi laisse un intervalle de six mois entre la sentence et l’exécution : Hélène Walker mit ce temps à profit. Le jour même de la condamnation de sa sœur, elle fit dresser une pétition contenant le détail exact des faits, et dans la nuit elle partit à pied pour Londres.

« Sans introduction ni recommandation, avec sa pétition toute simple, et peut-être mal rédigée (c’était sans doute l’ouvrage de quelque greffier de bas étage attaché au tribunal), elle se présenta en plaid de tartan, et avec l’habillement du pays, au feu duc d’Argyle, qui immédiatement lui fit obtenir la grâce qu’elle sollicitait. Munie de cette grâce, Hélène revint à pied, assez à temps pour sauver sa sœur.

« Ce récit m’intéressa si vivement que je me déterminai aussitôt à cultiver la connaissance d’Hélène Walker ; mais comme je devais quitter le pays le lendemain, je fus obligée d’ajourner mon projet jusqu’à mon retour, qui eut lieu au printemps suivant. Ma première promenade fut pour aller à la cabane d’Hélène Walker.

« Elle était morte quelque temps auparavant. Mes regrets furent extrêmes, et je fis mon possible pour obtenir des renseignements sur Hélène Walker, d’une autre vieille femme qui habitait l’autre partie de sa chaumière. Je lui demandai si Hélène avait jamais parlé de son histoire d’autrefois, de son voyage à Londres, etc. « Non, me répondit la vieille femme : Hélène était une rusée commère ; et si quelque voisin la questionnait là-dessus, elle détournait toujours la conversation. »

En un mot, tout ce que j’appris ne servit qu’à augmenter mes regrets et à exalter mon opinion sur Hélène Walker, qui avait uni tant de discrétion à une si héroïque vertu. »