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toujours est-il qu’ils n’entamèrent aucune procédure. Seulement, peu après, un exprès fut envoyé au solliciteur de Sa Majesté, lequel se rendit à Édimbourg en toute diligence. Mais pendant ce temps-là les plus coupables s’étaient enfuis, ou au moins s’étaient mis à l’abri, jusqu’à ce qu’ils pussent voir quelles mesures prendrait le gouvernement.

« À son arrivée, le solliciteur trouva la ville dans la consternation. On ne lui fournit aucun renseignement ; bien plus, les habitants avaient tellement peur de passer pour en avoir donné, que bien peu osaient lui parler dans les rues. Quoi qu’il en soit, ayant reçu les ordres de Sa Majesté par une lettre du duc de Newcastle, il résolut d’entamer l’affaire sur-le-champ, malgré l’obscurité profonde qui l’enveloppait, et il commença une information judiciaire. Il n’obtint des magistrats aucun renseignement qui mérite d’être cité ; mais il appela témoin sur témoin dans sa propre maison, sans formalité judiciaire ; et six mois durant, du matin au soir, il continua ses recherches, ne prenant pas le moindre repos, ne s’occupant d’aucune autre affaire.

« Il essaya d’abord d’obtenir des révélations en promettant le secret, de façon que ceux qui auraient dit la vérité ne seraient jamais nommés ; il ne se servit point de clerc, mais écrivit toutes les déclarations de sa propre main, pour encourager les témoins à parler. Malgré toutes ces précautions, pendant quelque temps il n’obtint que des lambeaux de récits qui, lorsqu’on remontait à la source, n’aboutissaient à rien ; car ceux qui paraissaient savoir quelque chose tremblaient de crainte qu’on pût croire qu’ils avaient fait connaître quelque coupable.

« Durant le cours de l’instruction, la plupart des habitants de la ville, qui s’étaient prononcés très-chaudement en faveur des auteurs du crime, commencèrent à changer un peu ; et quand on vit les gens du roi faire leur devoir avec zèle, la multitude, qui d’abord s’était exprimée très-vivement pour la défense des coupables, garda le silence, et dès lors beaucoup des derniers se cachèrent.

« Enfin l’information commençait à donner quelques lumières ; mais le solliciteur ne savait comment la continuer. Il voyait bien que le premier mandat d’arrêt qui serait délivré mettrait sur le qui vive toute la bande ; et comme il n’avait pu parvenir encore à connaître aucun des principaux auteurs du crime, il ne voulait pas, d’après le peu de preuves qu’il avait en main, commencer