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Les officiers de justice commencèrent alors à enlever l’échafaud, espérant par là accélérer la dispersion de la multitude. En effet, à peine la fatale potence fut-elle retirée du large piédestal ou soubassement en pierre dans lequel elle était fixée, à peine se fut-elle abaissée lentement sur la charrette destinée à la transporter à l’endroit où on la déposait d’ordinaire, que la populace, après avoir de nouveau exprimé son indignation par un cri de rage, se dispersa lentement pour retourner à ses travaux ordinaires.

Les fenêtres furent de même abandonnées successivement, et l’on vit les curieux d’une classe un peu plus élevée se former en groupes, et attendre pour regagner leurs maisons, que la foule fut écoulée. Contre l’usage presque général, ces personnes sympathisaient avec les sentiments des classes inférieures, et regardaient cette cause comme celle de toute la ville. En effet, comme nous l’avons déjà dit, ce n’était pas parmi les spectateurs du dernier rang ou les plus disposés à se soulever lors de l’exécution de Wilson, que la fatale décharge des soldats de Porteous avait fait le plus de victimes ; plusieurs personnes qui ne pouvaient faire partie des perturbateurs et qui tenaient un certain rang, avaient été tuées aux fenêtres : aussi les bourgeois, ressentant vivement les malheurs qu’ils avaient à déplorer, d’ailleurs fiers et jaloux de leurs droits, comme l’ont été de tout temps les citoyens d’Édimbourg, s’indignaient du sursis accordé à Porteous.

On remarqua alors, et on se rappela mieux encore dans la suite, que, tandis que la populace se dispersait, on avait vu divers individus aller d’un groupe à l’autre, sans s’arrêter longtemps nulle part, et dire tout bas quelques mots à ceux qui paraissaient déclamer avec le plus de violence contre la conduite du gouvernement. Ces agents si actifs semblaient être des gens de la campagne, et passaient généralement pour d’anciens amis et associés de Wilson, qui étaient fortement exaspérés contre Porteous.

Toutefois, si leur intention était d’exciter un soulèvement, ils échouèrent, au moins pour le moment. Tous les spectateurs se retirèrent paisiblement ; et ce n’était qu’à l’expression de colère empreinte sur leurs traits, et aux discours qu’ils tenaient, qu’on eût pu connaître l’état des esprits. Pour mettre le lecteur à même d’en juger par lui-même, nous nous introduirons dans un des nombreux groupes qui gravissaient péniblement la rue mon-