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qu’elle vous a donné ? — Croyez-vous que le pardon y soit, monsieur ? » demanda Jeanie avec toute la vivacité de l’espérance. « Oh ! non, dit le duc, ce n’est pas trop probable : les rois ne portent pas ainsi les pardons tout prêts sur eux, à moins de savoir d’avance qu’ils auront à en accorder. D’ailleurs Sa Majesté vous a dit que c’était du roi et non pas d’elle que cela dépendait. — C’est bien vrai, dit Jeanie ; c’est que j’ai l’esprit si confus… Mais Votre Honneur pense-t-elle que la grâce d’Effie soit assurée ? » continua-t-elle en tenant toujours dans sa main le petit portefeuille sans l’ouvrir.

« Vous connaissez notre dicton écossais : Les rois sont des chevaux un peu difficiles à ferrer des pieds de derrière, répondit le duc ; mais sa femme sait comment s’y prendre avec lui, et je n’ai pas le moindre doute que la grâce ne soit accordée. — Oh ! Dieu soit loué ! Dieu soit loué ! s’écria Jeanie, et puisse la bonne dame éprouver toute sa vie le contentement de cœur qu’elle me donne en ce moment ! Oh ! que Dieu vous bénisse aussi, milord ! sans votre appui je n’aurais pu parvenir jusqu’à elle. »

Le duc la laissa s’épancher sur ce sujet pendant assez longtemps, curieux peut-être de voir jusqu’à quel point le sentiment de la reconnaissance continuerait à l’emporter sur la curiosité ; mais ce dernier sentiment avait si peu de pouvoir sur l’esprit de Jeanie, que Sa Grâce, chez qui dans ce moment il était peut-être un peu plus vif, fut obligée de la faire penser de nouveau au présent de la reine. Jeanie ouvrit donc l’étui, y trouva l’assortiment ordinaire de ciseaux, aiguilles, soie et autres objets renfermés dans un nécessaire, et dans le petit portefeuille était un billet de banque de 50 liv. sterling.

Le duc n’eut pas plus tôt appris à Jeanie la valeur de ce billet, car elle n’en avait jamais eu d’aussi considérable, qu’elle exprima son regret de la méprise qui avait eu lieu. « Quant au nécessaire, dit-elle, c’est une chose qui m’est bien précieuse, et que je garderai toute ma vie comme un souvenir, d’autant que le nom de la reine est écrit en dedans, et surmonté d’une couronne. Voyez ! Caroline en toutes lettres, et écrit de sa main sans doute. »

Elle présenta donc le billet au duc, le priant de trouver quelque moyen de le rendre à la reine.

« Non, non, Jeanie, lui dit-il, il n’y a pas ici de méprise ; Sa Majesté sait que ce voyage vous a fait faire une grande dépense, et elle veut vous en dédommager. — Elle est vraiment trop bonne,