Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/318

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kerton en lui présentant la sauvegarde que Ratcliffe avait donnée à Jeanie Deans.

En regardant le papier, Dick cligna un œil, élargit son énorme bouche de l’une à l’autre oreille comme un canal de navigation, se gratta la tête bien fort, et dit : « Si je connais cela ? Ma foi, j’en pourrais bien connaître quelque chose, si ce n’était pas pour lui faire du tort, maîtresse. — Pas le moins du monde, dit mistress Bickerton ; seulement il t’en reviendra un verre d’eau-de-vie si tu veux parler. — Eh bien donc, » dit Dick, en tirant d’une main la ceinture de sa culotte et poussant un pied en avant pour achever l’arrangement de cette partie essentielle de son habillement, je puis assurer que la passe sera bien connue sur la route, si c’est là ce qu’on veut savoir… — Mais quelle espèce d’homme était-ce ? » dit mistress Bickerton en jetant un coup-d’œil d’intelligence à Jeanie, comme toute fière d’avoir un garçon qui en sût si long.

« Que sais-je, moi ? Jim-the-Rat était encore le coq du nord il y a un an, lui et l’Écossais Wilson, surnommé Handie Dandie… Mais il y a quelque temps qu’il est absent du pays, à ce qu’il paraît… Malgré cela, il n’y a pas un gentleman des grandes routes, d’ici à Stamford, qui ne respecte la passe de Jim. »

Sans lui faire d’autres questions, l’hôtesse remplit à Dick Ostler un verre de genièvre ; il inclina la tête et les épaules, tirant en arrière le pied qu’il avait avancé, avala d’un seul trait l’alcali, pour se servir d’un terme savant, et se retira dans son écurie.

« Je te conseille, Jeanie, si tu fais de mauvaises rencontres sur la route, de leur montrer ce morceau de papier, car je t’assure qu’il te sera utile. »

Un joli souper termina la soirée. L’Écossaise transplantée, je veux dire mistress Bickerton, mangea de bon appétit de deux ou trois plats fort épicés, but une pinte d’ale et un verre de négus un peu raide, tout en racontant à Jeanie l’histoire de la goutte, et s’étonnant qu’elle eût pu gagner une maladie que ses ancêtres, fermiers à Lammermoor depuis plusieurs générations, n’avaient jamais connue. Jeanie ne se soucia pas d’offenser son obligeante hôtesse en lui disant son opinion sur l’origine probable de cette maladie ; mais elle songea aux marmites des Égyptiens, et malgré toutes les instances qui lui furent faites, se contenta de souper avec des légumes accompagnés d’un verre d’eau.

Mistress Bickerton ne voulut pas entendre parler de paiement d’écot, et lui donna des recommandations pour son corres-