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dans le délire. Quand je revins à moi, cette femme me dit que mon enfant était mort. Je lui répondis que si cela était, il fallait qu’on l’eût assassiné. Là dessus cette femme s’emporta et me traita si durement que l’effroi me gagna ; et, dès qu’elle eut le dos tourné, je me traînai comme je pus hors de chez elle, et me rendis à Saint-Léonard aussi vite que mes forces me le permirent. D. — Pourquoi n’avez-vous pas raconté votre histoire à votre sœur et à votre père, et n’avez-vous pas réclamé l’autorité pour faire faire des recherches dans cette maison sur votre enfant ? R. — C’était mon dessein ; mais je n’en ai pas eu le temps. D. — Pourquoi cachez-vous en ce moment le nom de cette femme et le lieu de sa demeure ? »

Après avoir gardé le silence pendant un moment, la prévenue répondit :

R. « En répondant à cette question, je ne réparerais pas le mal qui a été fait, et je pourrais être cause qu’il en arriverait davantage. D. — Vous est-il jamais venu dans la pensée de vous défaire de cet enfant par la violence ? R. — Jamais ! Dieu m’en est témoin comme j’espère un jour en sa miséricorde ! »

En réponse à une seconde question du même genre, elle déclare qu’elle n’a jamais eu une telle intention tant qu’elle a eu l’usage de sa raison, mais qu’elle ne peut répondre des pensées criminelles que le malin esprit a pu lui suggérer pendant qu’elle était dans le délire. Enfin elle répondit à une troisième interrogation encore plus solennelle à ce sujet, qu’elle se serait laissé mettre en pièces par des chevaux furieux plutôt que de porter une main cruelle sur son enfant. La prévenue répond à une autre question que, parmi les mauvais propos que la femme chez qui elle était lui a tenus, elle l’a accusée d’avoir blessé son enfant pendant son délire ; mais la prévenue croit qu’elle n’avait d’autre motif, en lui disant cela, que de l’effrayer et de la forcer à garder le silence.

D. « Que vous a dit encore cette femme dans cette occasion ? R. — Au moment où je demandais à grands cris mon enfant d’une manière à attirer les voisins, cette femme me dit d’un ton menaçant que ceux qui avaient fait taire l’enfant sauraient bien me faire taire aussi si je ne me tenais tranquille. Cette menace et l’air dont elle fut faite me firent conclure qu’elle avait attenté à la vie de mon enfant, et que la mienne même était en danger : car cette femme, d’après ses manières et son langage, me parut capable de tout.