Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/187

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cliffe, c’est commencer d’une drôle de manière la profession d’honnête homme. Mais trêve de réflexions. Eh bien donc, j’ai vu et entendu Robertson parler à Effie Deans, cette jeune fille détenue pour infanticide. — Comment diable ! avez-vous vu cela, Ratcliffe ? c’est une bonne fortune inattendue qui nous arrive. Et cet homme qui a parlé à Butler dans le Parc, et qui avait un rendez-vous avec Jeanie Deans à la butte de Muschat. Diable ! en rapprochant tout cela… Je suis sûr, comme j’existe, qu’il est le père de l’enfant de cette jeune fille. — On pourrait deviner plus mal, » dit Ratcliffe en mâchant du tabac. « J’ai entendu parler il y a quelque temps d’une liaison qu’il avait avec une jolie fille, et c’est tout ce que Wilson a pu faire que de l’empêcher de l’épouser. »

Ici entra un officier de police, et il dit à Sharpitlaw qu’ils avaient amené la femme qu’il leur avait commandé d’arrêter.

« C’est à peu près inutile maintenant, répondit-il ; cependant, George, vous pouvez la faire entrer. »

L’officier se retira, et rentra bientôt après, accompagné d’une grande et forte fille de dix-huit à vingt ans, habillée d’une manière bizarre. Elle avait une espèce de redingote de drap blanc, garnie de vieux galons, et un jupon de camelot écarlate, avec une broderie de fleurs flétries ; ses cheveux, arrangés comme ceux d’un homme, étaient couverts d’un bonnet de montagnard, surmonté d’une touffe de plumes brisées ; ses traits étaient très-prononcés ; et cependant, à quelque distance, de grands yeux noirs très-brillants et d’une expression singulière, un nez aquilin et un profil assez imposant, lui donnaient quelque apparence de beauté. Elle agita en entrant une petite cravache qu’elle portait à la main, fit une révérence aussi basse qu’aucune dame à sa présentation à la cour le jour de l’anniversaire, eut l’air de se recueillir, et commença la conversation sans attendre qu’on lui fît des questions.

« Bien le bonsoir à ce bon monsieur Sharpitlaw, et puissé-je lui en souhaiter encore long-temps ! Bonsoir, Daddie Raton : on m’avait dit que vous étiez pendu, mon homme ; est-ce que vous vous êtes échappé des mains de John Dalgleish, comme Maggie Dickson, quand la besogne n’était qu’à moitié faite ? — Taisez-vous donc, impudente, et écoutez ce que l’on va vous dire. — De tout mon cœur, Raton. Quel honneur pour la pauvre Madge, de lui faire traverser les rues avec un grand homme