Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/155

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trevue avec le mystérieux étranger, le message pour Jeanie, sa conversation avec elle sur la rupture de leur liaison, la scène avec le vieux Deans, tout cela occupait si vivement son esprit qu’il avait oublié les événements tragiques de la nuit précédente. Le souvenir n’en fut réveillé en lui ni par les groupes répandus dans les rues, qui suspendaient leurs conversations dès qu’un étranger s’approchait d’eux ; ni par les perquisitions actives des agents de police soutenus par des patrouilles, ni par la vue des triples sentinelles placées devant le corps-de-garde, ni par l’air inquiet et craintif de la populace qui, se sachant suspecte sinon coupable d’avoir pris part à l’insurrection, et redoutant les recherches de la police, se dispersait avec timidité comme des hommes, qui épuisés par une débauche nocturne, se trouvent, le lendemain, énervés, sans assurance ni courage.

Aucun de ces symptômes ne frappa l’esprit de Butler, absorbé par un sujet bien plus intéressant pour lui, jusqu’à ce qu’il fût arrivé devant l’entrée de la prison que gardait un double rang de grenadiers au lieu des barres et des verrous. Le cri : « On n’entre pas ! » les murs noircis du porche, les escaliers tournants et les chambres de la prison ouverts aux regards du public, lui rappelèrent les événements de cette nuit terrible. Il demanda à voir Effie ; et le même geôlier, grand, maigre, à la chevelure blanche, qu’il avait vu la veille, se présenta à lui.

« Vous êtes, je crois, » dit-il à Butler avec cette circonspection qui caractérise les Écossais, « la même personne qui vint pour la voir hier au soir ? »

Butler répondit affirmativement.

« Et c’est vous, continua le geôlier, qui m’avez demandé si c’était à cause de l’affaire de Porteous que nous fermions la porte plus tôt qu’à l’ordinaire ? — Il est possible, dit Butler, que je vous aie fait cette question ; mais je vous demande maintenant si je puis voir Effie Deans ? — Je ne puis que vous dire : Entrez, montez l’escalier, et tournez dans le guichet à droite. »

Le vieillard suivit Butler son trousseau de clefs à la main, n’oubliant pas même cette énorme clef qui ouvrait et fermait la porte extérieure de son empire, et qui n’était plus alors qu’un inutile fardeau. Butler ne fut pas plus tôt entré dans la chambre indiquée, que le guichetier en saisit la clef et l’y enferma. Butler crut que c’était une précaution ordinaire à cet homme ; mais quand il entendit le commandement de : « Avancez, sentinelle ! » et le