Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/87

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ton, se leva avec tous les signes du respect et de l’humilité. Restant debout en présence du gouverneur, il semblait attendre ses interrogations, comme s’il avait prévu que la visite le concernait particulièrement.

« Je dois supposer, sire ménestrel, dit sir John de Walton, que vous avez été heureux dans vos recherches, et que vous avez découvert le volume de poésies ou de prédictions que vous désiriez trouver parmi ces rayons brisés et ces livres en lambeaux ? — Plus heureux que je ne pouvais m’y attendre, répliqua le ménestrel, après l’incendie qui a dévoré une partie du château. Voici sans doute, sire chevalier, le fatal volume que je cherchais, et il est étonnant, vu le malheureux sort qu’ont éprouvé les autres livres de cette bibliothèque, que j’aie pu encore en réunir quelques fragments, bien qu’incomplets. — Donc, puisqu’on vous a permis de satisfaire votre curiosité, dit le gouverneur, j’espère bien, sire ménestrel, que vous ne refuserez pas de contenter la mienne. »

Le ménestrel répondit, toujours avec la même humilité, que « s’il y avait quelque chose dans la sphère de ses pauvres talents qui pût causer du plaisir à sir John de Walton, il demandait le temps d’aller chercher son luth, et qu’il serait ensuite à ses ordres. — Vous ne me comprenez pas, ménestrel, » répliqua de Walton un peu durement. « Je ne suis pas de ces gens qui ont des heures à perdre à écouter des histoires ou de la musique d’autrefois ; ma vie ne m’a suffi qu’à peine pour apprendre les devoirs de ma profession, moins encore doit-elle me laisser le temps de m’occuper de pareilles folies. Peu m’importe qu’on le sache, mais mon oreille est tellement incapable de juger de votre art, qui sans doute vous paraît on ne peut plus noble, que je sais à peine distinguer la différence d’un air avec un autre. — En ce cas, » répondit le ménestrel avec calme, « je ne puis guère me promettre le plaisir d’amuser Votre Seigneurie comme j’avais espéré de le faire. — Et je ne m’attends pas du tout à ce que vous m’amusiez, » répliqua le gouverneur en se rapprochant de lui d’un pas ferme, et en parlant d’un ton plus sévère : « je veux des renseignements que vous pouvez me donner, j’en suis sûr, pour peu que vous en ayez l’envie. Mon devoir est de vous prévenir que, si vous hésitez le moins du monde à dire la vérité, je connais des moyens par lesquels je serais malheureusement forcé de vous l’arracher, et d’une manière qui vous sera plus désagréable que je ne le désirerais. — Si vos questions, sire chevalier, répondit Bertram, sont telles que je puisse ou doive