Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/334

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

calmer. « Je faisais seulement allusion en plaisantant à ces chances qui ne sortent jamais de la tête des jeunes filles, et auxquelles vous pensez si peu. — Je souhaite, mon cher John, » dit Clara en s’efforçant de reprendre son sang-froid ; « je souhaite que vous profitiez de mon exemple, et que vous renonciez à toutes les chances de la fortune… vous ne vous en trouveriez point mal. — Qu’en savez-vous, petite folle ? reprit Mowbray : je veux vous prouver le contraire. Voici un billet payable à votre ordre pour la somme que vous m’avez prêtée, et quelque chose de plus… ne laissez pas le vieux Mick y mettre le doigt ; chargez de cette commission Bindloose… c’est le plus honnête homme de ces deux coquins. — Ne voudriez-vous pas, mon frère, faire passer vous-même le billet à Bindloose ? — Non, non, répliqua Mowbray ; il pourrait mêler cette affaire avec les miennes, et cela ne tournerait pas à votre avantage. — Je suis charmée que vous soyez en état de me rendre ce que vous me devez, car j’avais besoin d’argent pour acheter le nouvel ouvrage de Campbell. — Je souhaite que votre acquisition vous procure beaucoup de plaisir… mais ne vous fâchez pas contre moi de ce que je me soucie fort peu de Campbell… Je ne me connais pas plus en livres que vous en gageures. Maintenant parlons sérieusement, et dites-moi si vous voulez être une bonne fille… Laissez là vos caprices, et recevez ce jeune seigneur anglais comme il convient à une femme de votre rang. — Rien de plus facile, répondit Clara ; mais, je vous en conjure, ne me demandez rien de plus… Dites-lui que je suis une pauvre créature faible d’esprit, malade de corps, souffrante, inquiète et agitée. Enfin, dites-lui que je ne puis le recevoir qu’une seule fois. — Je ne lui dirai pas une telle chose, » répondit Mowbray d’un air mécontent. « Je le vois, il faut tout vous apprendre. Je ne voulais pas entamer cette discussion ; mais puisqu’elle est inévitable, mieux vaut plus tôt que plus tard… Vous saurez donc, Clara Mowbray, que lord Étherington est amené ici par des vues particulières, et que ces vues, je les connais et les approuve entièrement. — Je m’y attendais, » répliqua Clara de la même voix altérée qu’elle avait eue dans tout le cours de la conversation ; « j’avais un pressentiment de ce dernier malheur !… Mais, Mowbray, je ne suis point une enfant… je ne puis ni ne veux recevoir le comte. — Comment, » s’écria Mowbray d’un accent irrité, « osez-vous me faire un refus si positif ? Pensez-y bien, car si nous ne pouvons nous entendre, c’est vous qui en souffrirez. — Comptez-y bien de votre côté, » continua-t-elle avec