Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/178

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chargés. À chacun d’eux l’archer adressait la parole pour leur demander s’il existait réellement un lieu appelé Bloody-Sykes, et où l’on pourrait le trouver… mais tous semblaient l’honorer ou vouloir éviter de répondre : ce à quoi ils trouvaient toujours un prétexte dans la manière dont les interrogeait le joyeux archer, manière qui se ressentait passablement du déjeuner qu’il venait de faire. La réponse générale était qu’on ne connaissait pas de lieux semblables, ou qu’on avait bien d’autres choses à faire le matin d’une si grande fête, qu’à répondre à de frivoles questions. Enfin, comme dans une occasion ou deux la réponse des Écossais approcha presque de l’insolence, le ménestrel tira de là quelques observations : d’après lui, il y avait toujours quelque machination sous jeu, quand le peuple de ce pays ne savait pas répondre honnêtement à ses supérieurs, lui d’ordinaire si disposé à le faire ; en outre ils paraissaient se rassembler en bien grand nombre pour le service du jour des Rameaux.

« Vous ferez sans doute, sire archer, continua le ménestrel, votre rapport au chevalier en conséquence ; car je vous l’assure, si vous y manquez, je me sentirai moi-même (la sûreté de ma maîtresse y étant aussi intéressée) dans la nécessité d’exposer à sir John de Walton les circonstances qui me font concevoir des soupçons de cette affluence extraordinaire d’Écossais, et de la malhonnêteté qui a remplacé la courtoisie habituelle de leurs manières. — Paix, sire ménestrel ! » répliqua l’archer mécontent de l’intervention de Bertram : « croyez que plus d’une fois le sort d’une armée a dépendu de mes rapports au général, qui ont toujours été clairs et précis, suivant le devoir du soldat. Votre carrière, mon digne ami, a été tout-à-fait différente de la mienne : vous n’avez eu toute votre vie à songer que d’affaires de paix, de vieilles chansons, de prophéties et autres choses sur lesquelles je ne veux pas disputer avec vous ; mais, croyez-moi, il sera dans l’intérêt de notre réputation à tous deux que nous ne cherchions pas à empiéter sur nos attributions réciproques. — Pour ma part, je suis loin de vouloir le faire, répliqua le ménestrel ; mais je désirerais que nous retournassions promptement au château, afin de demander à sir John de Walton son opinion sur ce que nous venons de voir. — À cela il ne peut y avoir d’objection, repartit Greenleaf ; mais si nous allions chercher le gouverneur à l’heure qu’il est, nous le trouverions prêt à se rendre à l’église de Douglas, où il ne manque jamais de se trouver en des occasions comme celle-ci avec la plus grande partie de ses officiers, pour empêcher