Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/175

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ce royaume. Suivez mon conseil, et taisez-vous sur ce sujet ; car, croyez-moi, l’épée d’un véritable archer anglais sortira du fourreau sans le consentement de son maître, s’il entend dire quelque chose au préjudice de saint George et de sa croix rouge. L’autorité de Thomas-le-Rimeur, ou de tout autre prophète d’Écosse, d’Angleterre ou du pays de Galles, ne sera point regardée comme une excuse valable pour ces inconvenantes prédictions. — Je serais toujours fâché de vous causer la moindre offense, dit le ménestrel, et à plus forte raison de vous mettre en colère lorsque je reçois de vous l’hospitalité. Vous n’oublierez cependant pas ce point, je l’espère : c’est uniquement sur votre invitation que je mange à votre table, et si je vous parle des événements futurs, je le fais sans avoir la moindre intention de travailler pour ma part à ce qu’ils se réalisent ; car, Dieu m’est témoin, il y a bien des années que je lui demande sincèrement paix et bonheur pour tous les hommes, et surtout gloire et félicité pour le pays des braves archers, où je suis né moi-même, et que je suis tenu de mentionner dans mes prières avant toutes les autres nations du monde. — Et vous avez raison, répliqua Gilbert ; car ainsi vous remplissez un devoir indispensable envers le beau pays de votre naissance, qui est le plus riche de tous ceux qu’éclaire le soleil. Il y a cependant une chose que je voudrais bien savoir, s’il vous plaît de me la dire : ne trouvez-vous rien dans ces rimes grossières qui paraisse concerner la sûreté du château de Douglas où nous sommes en ce moment… car, voyez-vous, sire ménestrel, j’ai remarqué que ces parchemins moisis, peu importe leur date et le nom de l’auteur, ont cette certaine coïncidence avec la vérité, que, quand les prédictions qu’ils contiennent sont répandues dans le pays, et occasionent des bruits de complots, de conspirations et de guerres sanglantes, ces bruits sont très aptes à causer les malheurs mêmes qu’ils ne sont censés que prédire. — Il ne serait pas alors très prudent à moi, repartit le ménestrel, de choisir pour texte de mes commentaires une prophétie qui aurait rapport à une attaque de ce château ; car, dans ce cas, je m’exposerais, selon votre raisonnement, au soupçon de vouloir amener un résultat que personne ne regretterait plus vivement. — Je vous donne ma parole, mon cher ami, répliqua l’archer, qu’il n’en sera point ainsi à votre égard : car d’abord je ne concevrai aucune mauvaise opinion de vous, et je n’irai pas dire ensuite à sir John de Walton que vous méditez mal contre lui ou sa garnison… et, à parler franchement, sir John de Walton ne croirait pas l’individu