Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/167

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tons en ce moment ; le lieu du combat, cette clairière qu’on nomme Bloody-Sykes ; le temps, ce moment même ; et les combattants, comme de vrais chevaliers, renonceront de part et d’autre à tous les avantages qu’ils peuvent avoir. — Soit, au nom du ciel ! » dit le chevalier anglais, qui, quoique surpris d’être inopinément défié en duel par un guerrier aussi formidable que le jeune Douglas, était trop fier pour songer à éviter le combat. Faisant signe à la dame de se retirer derrière lui, afin de ne point perdre ce qu’il avait obtenu, en l’arrachant aux mains du chasseur, il tira son épée, et, prenant l’attitude grave et résolue de l’attaque, s’avança lentement vers son adversaire. La rencontre fut terrible, car le courage et l’adresse tant du lord de Douglas-Dale que du sire de Walton étaient cités parmi les plus célèbres de l’époque, et le monde de la chevalerie ne peut guère se vanter d’avoir produit deux guerriers plus fameux. Leurs coups tombaient rapides et pesants comme les traits lancés par quelque formidable machine ; ils étaient parés et rendus avec autant de force que de dextérité, et il ne paraissait pas vraisemblable, même après dix minutes de combat, que l’un des deux combattants pût remporter l’avantage sur l’autre. Ils s’arrêtèrent un instant, comme d’un commun accord, pour reprendre haleine, et pendant cet intervalle Douglas dit : « Je prie cette noble dame de bien comprendre que sa propre liberté ne dépend en aucune manière de l’issue de cette lutte. Le combat n’a rapport qu’à l’affront fait par ce sir John de Walton et par la nation anglaise à la mémoire de mon père et à mes droits naturels. — Vous êtes généreux, sire chevalier, répliqua la dame ; mais en quelle position me placez-vous si vous me privez de mon protecteur par la mort ou la captivité, et que je reste seule dans un pays étranger ? — Si tel devait être l’événement du combat, répondit sir James, Douglas lui-même, madame, vous rendrait à votre terre natale, car jamais son épée ne causa de maux qu’il ne fût prêt à réparer avec cette même épée, et si le noble de Walton veut indiquer le moins du monde qu’il renonce à ce combat, ne fût-ce qu’en détachant une plume du panache de son casque, Douglas renoncera pour sa part à tout projet pouvant porter atteinte à l’honneur ou à la sûreté d’une illustre dame. Cette lutte demeurera suspendue jusqu’à ce que la querelle nationale nous ramène en face l’un de l’autre. »

Sir John de Walton réfléchit un moment, et Augusta de Berkely, quoiqu’elle ne parlât point, lui jeta un regard qui indiquait