Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/94

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tendre ? Sors d’ici ! et n’ose jamais sous aucun prétexte reparaître à mes yeux… sous la réserve toujours du bon plaisir de l’empereur notre père. »

Le Varangien fixa les yeux sur Achille Tatius, comme étant la personne de qui il devait recevoir l’ordre de rester ou de se retirer. Mais l’empereur lui-même évoqua l’affaire devant lui avec beaucoup de dignité.

« Mon fils, dit-il, nous ne pouvons permettre cela. En raison de quelque différend matrimonial entre vous et notre fille, vous oubliez étrangement notre rang impérial, et vous ordonnez de sortir à ceux qu’il nous a plu de faire venir en notre présence. Ceci n’est ni juste ni convenable, et notre bon plaisir n’est point que ce même Hereward… ou Édouard… peu importe son nom, nous laisse en ce moment, ou qu’il se dirige à l’avenir par aucun autre ordre que les nôtres ou ceux de notre Acolouthos, Achille Tatius. Et maintenant laissons cette folle affaire, qu’un mauvais coup de vent a, je crois, soufflée parmi nous, passer comme elle est venue, sans nous en occuper davantage. Nous vous prions de nous faire connaître les graves affaires d’état qui vous ont amené en notre présence à une heure si avancée… Vous regardez ce Varangien… que sa présence ne vous empêche point de parler, je vous prie, car il est aussi avant dans notre confiance, et, nous en sommes convaincus, à aussi juste titre qu’aucun conseiller qui nous ait prêté serment comme attaché à notre personne. — Entendre, c’est obéir, » répondit le gendre de l’empereur, qui s’aperçut qu’Alexis était un peu ému, et qui savait qu’il n’était ni prudent ni avantageux de le pousser à bout. « Ce que j’ai à dire, ajouta-t-il, deviendra dans si peu de temps une nouvelle publique, que peu importe qui l’entende ; et néanmoins l’Occident, si rempli d’étranges changements, n’a jamais envoyé à la partie orientale du globe des nouvelles aussi alarmantes que celles que je viens maintenant annoncer à Votre Altesse impériale. L’Europe, pour emprunter une expression de celle qui m’honore en me donnant le titre d’époux, semble arrachée de ses fondements et prête à se précipiter sur l’Asie. — C’est ainsi que je m’exprimais, dit la princesse Anne Comnène, et non sans quelque force, je pense, lorsque nous apprîmes pour la première fois qu’un enthousiasme sans frein avait saisi tous ces barbares turbulents d’Europe et les avait amenés comme une tempête de mille nations sur nos frontières de l’Ouest, dans le dessein extravagant de se rendre maîtres de la Syrie et des lieux saints, où sont les sépulcres des prophètes, où souffri-