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impériale, et la rendre veuve par suite de prétentions ambitieuses. Mais, outre l’influence d’autres souvenirs dont on aura connaissance plus tard, Hereward, quoique flatté du degré extraordinaire d’attention que la princesse lui accordait, ne voyait en elle que la fille de son empereur, du seigneur suzerain qu’il avait adopté, et l’épouse d’un noble prince, à laquelle la raison et le devoir lui défendaient de penser sous aucun autre rapport.

Après quelques efforts préliminaires, la princesse Anne commença enfin sa lecture, et ce fut d’une voix émue et presque tremblante, mais qui reprit de l’assurance et de l’énergie à mesure qu’elle avança dans la relation suivante, tirée d’une partie de l’histoire bien connue d’Alexis Comnène, mais qui malheureusement n’a pas été comprise dans l’édition des historiens byzantins. Ce morceau ne peut donc qu’être agréable aux antiquaires ; et l’auteur espère recevoir du monde savant des remercîments pour avoir recouvré un fragment curieux, qui, sans ses recherches, serait probablement tombé dans le gouffre de l’oubli.

LA RETRAITE DE LAODICÉE.

Traduite pour la première fois du grec, et faisant partie de l’histoire d’Alexis Comnène, écrite par la princesse sa fille.

« Le soleil venait de se coucher dans l’Océan, et l’on aurait dit qu’il se voilait honteux de voir l’armée immortelle de notre empereur très sacré entourée de hordes sauvages de barbares infidèles qui, comme nous l’avons dit dans notre chapitre précédent, occupaient les divers défilés en avant et en arrière des Romains[1] ; les rusés barbares s’en étaient emparés la nuit précédente. Ainsi, quoiqu’une marche triomphante nous eût conduits jusqu’à ce point, ce fut alors une question grave et douteuse de savoir si nos aigles victorieuses pourraient pénétrer plus avant dans le pays de l’ennemi ou se retirer avec sûreté dans le leur.

« La science vaste et profonde de l’empereur dans l’art militaire science dans laquelle il surpasse la plupart des princes vivants l’avait déterminé à faire reconnaître, avec une exactitude et une prévoyance merveilleuse, la position précise de l’ennemi. Il avait employé dans cette circonstance importante certains barbares légèrement armés, qui avaient puisé leurs habitudes et leur discipline dans les déserts de la Syrie ; et s’il m’est imposé d’écrire ce que me

  1. Les Grecs serait le mot convenable, mais nous traduisons l’expression de la belle historienne. w. s.