Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/68

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on voudra les appeler de tout autre nom païen, quel qu’il soit. C’est, je puis le dire, le barbare des barbares ; mais quoique par sa naissance et son éducation il soit indigne de fouler de ses pieds le tapis de ce temple sacré des talents et de l’éloquence, il est si brave, si fidèle, si dévoué, si prêt à entreprendre sans hésiter… — Assez, assez, bon Acolouthos, interrompit l’empereur ; assurez-nous seulement qu’il a du sang-froid et qu’il est observateur ; qu’il n’est pas susceptible de se laisser agiter et troubler pendant le combat, défaut que nous avons quelquefois remarqué en vous et en d’autres commandants, et, il faut l’avouer, ainsi qu’en nous-même dans certaines occasions extraordinaires. Disons cependant que cette différence dans la constitution des hommes ne provient point d’une infériorité de courage, mais bien d’un certain sentiment intime de l’importance de notre salut personnel pour le bien de tous, et des devoirs qui nous sont imposés. Parle donc, et parle en peu de mots, Tatius, car je m’aperçois que notre très chère épouse et notre fille trois fois heureuse et née dans la chambre de pourpre paraissent agitées de tant soit peu d’impatience. — Hereward, répondit Achille Tatius, est aussi calme et aussi bon observateur dans une bataille, qu’un autre le serait dans une danse joyeuse. La poussière des combats est le souffle de ses narines, et il prouvera sa valeur en combattant contre quatre autres qui seront (les Varangiens exceptés) réputés les plus braves sujets de Votre Majesté impériale. — Acolouthos, » dit Alexis avec une expression de mécontentement, « au lieu de donner à ces pauvres ignorants barbares des leçons de civilisation, et de les initier à la connaissance des lois de cet empire éclairé, vous alimentez, par ces vaines paroles, l’orgueil et l’emportement naturels qui les poussent à avoir des querelles continuelles avec les autres légions étrangères, et qui en suscitent même entre eux. — Si ma bouche ose s’ouvrir pour faire entendre la plus humble excuse, dit Achille Tatius, je prendrai la liberté de répondre qu’il y a à peine une heure, je parlais à ce pauvre ignorant Anglo-Danois de la sollicitude paternelle avec laquelle Votre Majesté impériale veille à la conservation de cette concorde qui doit unir ceux qui suivent votre étendard ; et je lui disais combien vous êtes désireux d’encourager cette harmonie, et plus particulièrement encore entre les diverses nations qui ont le bonheur de vous servir, en dépit des habitudes sanglantes des Francs et des autres habitants du Nord, qui ne peuvent vivre sans guerres intestines. Je crois que l’intelligence du pauvre jeune homme suffit pour rendre témoignage