Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/47

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au principe le plus profond de la politique qui règne à la cour de Constantinople, il faut que tu saches que la faveur de l’empereur (ici l’officier leva son casque, et le soldat fit semblant d’en faire autant), de l’empereur, dis-je (et que tout lieu où il pose le pied soit sacré), est le principe vivifiant de la sphère dans laquelle nous vivons, de même que le soleil est le principe vivifiant de l’humanité. — J’ai entendu nos tribuns dire quelque chose de semblable à ceci. — C’est leur devoir de vous instruire ; et j’espère que les préteurs aussi, dans tout ce qui concerne leurs fonctions, n’oublient pas d’apprendre à mes Varangiens le service constant qu’ils doivent à l’empereur. »

« Ils n’y manquent pas, quoique nous autres exilés nous connaissions nos devoirs. — À Dieu ne plaise que j’en doute. Tout ce que je veux, c’est te faire comprendre, mon cher Hereward, qu’il existe ici ce qu’on ne trouve peut-être pas dans ton climat sombre et humide, une race d’insectes qui naissent aux premiers rayons de l’astre du jour, et qui expirent avec ceux du soleil couchant ; de là ce nom d’éphémères, qui signifie qui ne durent qu’un seul jour. Tel est le sort d’un favori à la cour, tant qu’il jouit des gracieux sourires de Sa Majesté très sacrée Heureux celui dont la faveur, croissant à mesure que sa personne s’élève au dessus du niveau qui environne le trône, se développe aux premières lueurs de la gloire impériale, et se soutenant pendant l’éclat que répand à son midi la puissance souveraine, ne disparaît et meurt qu’avec les derniers rayons du soleil impérial ! — Votre Valeur parle un langage plus élevé que mon intelligence septentrionale n’est capable de le comprendre : il me semble seulement que, plutôt que de mourir au soleil couchant ; je voudrais, puisqu’il faut que je sois insecte, devenir mite pendant deux ou trois heures de nuit. — Tel est le sordide désir du vulgaire, » répondit le chef des Varangiens d’un ton de supériorité ; « il se contente de jouir de la vie sans obtenir de distinction, tandis que nous autres, gens d’une trempe supérieure, qui formons le cercle le plus intime et le plus rapproché du trône impérial dont Alexis est le point central, nous surveillons avec la jalousie d’une femme la distribution de ses faveurs, et nous liguant avec les uns contre les autres, nous ne laissons échapper aucune occasion de nous placer personnellement devant les jeux du souverain sous le jour le plus favorable. — Je crois comprendre ce que vous voulez dire, interrompit le Varangien, quoique pourtant une telle vie d’intrigue… mais peu importe. — Peu t’importe en effet,