Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/383

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souper à notre cour avec notre épouse et notre fille, et ceux de nos serviteurs et alliés qu’il nous plaira d’appeler au même honneur. Sois assuré que, tant que tu resteras avec nous, il n’est point de distinction que nous ne t’accordions volontiers… Et toi, Achille Tatius, approche. Tu n’es pas moins en faveur auprès de ton empereur, qu’avant le commencement de ce jour. Les accusations portées contre toi n’ont été entendues que par une oreille amie qui ne s’en souviendra que si de nouvelles fautes (ce qu’à Dieu ne plaise !) viennent en réveiller le souvenir. "

Achille Tatius s’inclina si fort que le panache de son casque toucha la crinière de son superbe coursier ; mais il crut qu’il valait mieux s’abstenir de toute réponse, laissant son crime et son pardon se perdre dans les termes généraux dont l’empereur s’était servi.

La multitude se remit encore une fois en marche pour la ville, et aucun nouvel incident n’interrompit son retour. Sylvain, accompagné d’une couple de Varangiens qui l’emmenèrent comme un prisonnier, prit la route des souterrains de Blaquernal qui étaient dans le fait son habitation convenable.

Tout en cheminant vers Constantinople, Harpax, le fameux centurion des gardes immortelles, eut un entretien avec un ou deux de ses soldats et quelques citoyens qui avaient pris part à la conspiration.

« Ah ! dit Stéphanos l’athlète, la belle affaire que nous avons faite là ! Nous laisser devancer et trahir par un lourd Varangien ! Toutes les chances ont tourné contre nous, comme elles tourneraient contre Corydon le savetier, s’il osait me défier dans le cirque. Ursel, dont la mort avait produit tant d’effet, se trouve n’être pas mort après tout, et qui pis est, il ne vit pas à notre avantage. Ce drôle d’Hereward, qui hier ne valait pas mieux que moi… Que dis-je donc ?… mieux ! Il valait beaucoup moins ; un être insignifiant sous tous les rapports !… le voilà maintenant comblé d’honneurs, de louanges, de présents, jusqu’à ce qu’on lui fasse rendre tout ce qu’on lui aura donné. Le césar, l’acolouthos, nos complices, ont perdu l’amitié et la confiance de l’empereur ; et si on les laisse vivre, il en est d’eux comme de ces volailles domestiques que nous gorgeons aujourd’hui de nourriture pour leur tordre demain le cou et les mettre à la broche ou dans le pot. — Stéphanos, répondit le centurion, ta force de corps te rend propre à la palestre, mais ton esprit n’est pas assez fin pour discerner ce qui est réel de ce qui n’est que probable dans le monde politique, que tu te mêles de juger