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CHAPITRE XXIII.

LE MESSAGE.


Le Varangien ne quitta le comte de Paris que lorsque ce dernier lui eut remis entre les mains son cachet semé, en terme de blason, de lances rompues, et portant cette fière devise : « La mienne est encore intacte. » Muni de ce symbole de confiance, il eut alors des mesures à prendre pour informer le chef des croisés de la solennité qui se préparait, et pour lui demander, au nom de Robert de Paris et de la dame Brenhilda, un détachement de cavaliers occidentaux assez considérable pour assurer la stricte observation des règles de l’honneur et de la justice dans l’arrangement de la lice et pendant la durée du combat. Les devoirs imposés à Hereward étaient de telle nature qu’il se trouvait dans l’impossibilité de se rendre en personne au camp de Godefroy ; et quoiqu’il y eût beaucoup de Varangiens auxquels il se pouvait fier, il n’en connaissait pas parmi ceux qui se trouvaient immédiatement sous ses ordres dont l’intelligence lui parût devoir suffire dans une occasion aussi extraordinaire. Dans celle perplexité, il se dirigea… peut-être sans bien savoir pourquoi… vers les jardins d’Agelastès, où le hasard lui procura une seconde rencontre de Bertha.

Hereward ne l’eut pas plus tôt informée de son embarras, que la résolution de la courageuse jeune fille fut irrévocablement prise.

« Je vois, dit-elle, que le péril de cette partie de l’aventure me regarde ; et pourquoi ne m’y exposerais-je pas ? Ma maîtresse, du sein de la prospérité, s’offrit pour courir le monde avec moi ; je me rendrai pour elle au camp du seigneur franc. C’est un honnête homme, un pieux chrétien, et ses soldats sont de zélés pèlerins. Une femme ne peut rien avoir à craindre, allant remplir une telle mission auprès de tels hommes. »

Mais le Varangien connaissait trop bien les mœurs des camps pour permettre à la belle Bertha de se mettre seule en route. Il lui donna donc pour compagnon un vieux soldat qu’il s’était attaché depuis long-temps par sa bonté et sa confiance ; et après avoir instruit son amante de tous les détails du message qu’elle allait porter, il lui recommanda de se tenir prête à partir dès la pointe du jour, et revint encore une fois aux casernes.

Au lever de l’aurore, Hereward se trouva au lieu où il avait