Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/282

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d’entre eux, deux à la fois, avaient déjà fait la proclamation, qui allait être répétée une troisième fois par les deux derniers, comme c’était l’usage à Constantinople quand on publiait un mandat impérial de grande importance. Achille Tatius, dès qu’il aperçut son confident, lui fît un signe pour faire comprendre à Hereward qu’on voulait lui parler après la proclamation. Après les fanfares des trompettes, les hérauts commencèrent en ces termes :

« De par l’autorité du resplendissant et divin Alexis Comnène, empereur du très saint Empire romain, Sa Majesté impériale désire que ce qui va suivre soit connu de tous et de chacun de ses sujets, de quelque race qu’ils descendent, et devant quelque autel qu’ils fléchissent le genou… Sachez que le second jour après la date de la présente publication, notre bien-aimé gendre, le très estimé césar, s’est engagé à combattre notre ennemi Robert, comte de Paris, pour avoir eu l’audace d’occuper en public notre trône impérial, comme pour celle d’avoir brisé en notre vénérable présence les précieux chefs-d’œuvre ornant ledit trône, et appelés par tradition les Lions de Salomon. Et afin qu’il ne puisse exister en Europe un homme qui ose dire que les Grecs sont en arrière des autres parties du monde, dans aucun des mâles exercices en usage chez les nations chrétiennes, lesdits nobles ennemis renonçant à tout secours qui peut venir de trahison, de talismans et de magie, videront cette querelle en trois courses avec des lances émoulues, et en trois passes d’armes avec des sabres bien aiguisés, la victoire devant être décidée par l’honorable empereur, qui jugera suivant son gracieux et infaillible bon plaisir. »

Une autre bruyante fanfare termina la cérémonie. Achille congédia alors les soldats présents, aussi bien que les hérauts et les musiciens, qui regagnèrent leurs quartiers respectifs ; et prenant Hereward à part, il lui demanda s’il avait appris quelque chose du prisonnier Robert, comte de Paris.

« Rien, sauf les nouvelles que contient votre proclamation, répondit le Varangien — Tu penses donc qu’elle est faite avec le consentement du comte ? — Il le faut bien. Je ne connais personne assez hardi pour descendre à sa place dans la lice. — Eh bien ! écoute, mon excellent Hereward, quoique tu aies la compréhension un peu difficile ; sache que notre césar a eu l’extravagance d’établir une comparaison entre son pauvre esprit et celui d’Achille Tatius. Il tient beaucoup à son honneur, cet étrange fou ; il ne peut se faire à l’idée qu’on suppose qu’il a provoqué une femme ou