Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/220

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sit à la gorge et lui coupa la parole. Ils tombèrent lourdement sur le sol du cachot, le geôlier dessous, et Robert de Paris, dont la nécessité excusait l’action, plongea son poignard dans la gorge du misérable. Au même moment, le bruit d’une armure se fit entendre, et descendant rapidement l’échelle, notre vieille connaissance Hereward se trouva au milieu du cachot. La lumière qui avait roulé de dessus la tête du geôlier le montrait baigné de sang et rendant le dernier soupir sous la main de l’étranger qui le serrait toujours. Hereward n’hésita point à voler à son secours, et saisissant le comte de Paris avec le même avantage que celui-ci avait eu sur son adversaire un moment auparavant, il le retint fortement sous lui la face contre terre. Le comte Robert était un des hommes les plus vigoureux de ce siècle guerrier ; mais il en était de même du Varangien ; et si ce dernier avait obtenu un avantage décidé en plaçant son antagoniste sous lui, on n’aurait certainement pas pu deviner comment aurait tourné le combat.

« Rends-toi ! comme vous le dites dans votre jargon, rescousse ou non rescousse, s’écria le Varangien, ou meurs sous la pointe de mon poignard ! — Un comte français ne se rend jamais, » répondit Robert qui commença à deviner à quelle sorte de personne il avait affaire, « surtout à un esclave vagabond comme toi ! » À ces mots, il fit un effort pour se relever, tellement subit, violent et puissant, qu’il se serait débarrassé de l’étreinte du Varangien, si Hereward, employant toute sa force extraordinaire, n’eût lutté pour conserver ses avantages, et levé son poignard, afin de terminer définitivement le combat ; mais un ricanement bruyant, qui n’avait rien d’humain, se fit entendre en ce moment. Le bras étendu du Varangien fut saisi avec vigueur, tandis qu’un bras rude, s’enlaçant autour de son cou, le renversa sur le dos et donna au comte français la facilité de se remettre sur pied.

« Mort à toi, misérable ! » dit le Varangien, sachant à peine qui il menaçait ; mais l’homme des bois gardait, à ce qu’il paraît, de terribles souvenirs des prouesses de l’humanité. Il s’enfuit rapidement au haut de l’échelle, et laissa Hereward et son libérateur vider leur querelle comme bon leur semblerait.

Les circonstances semblaient promettre un combat désespéré : tous deux étaient de haute stature, forts et courageux, tous deux portaient une armure défensive, et le poignard terrible était leur seule arme offensive, lis s’arrêtèrent, se regardant l’un l’autre, et examinèrent attentivement leurs moyens respectifs de défense avant