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porté pour leur servir en de semblables occasions durant la croisade. Même en France Robert se montrait rarement avec la toque pacifique et le manteau traînant, dont le panache élevé et les plis flottants formaient la parure des chevaliers en temps de paix. Il était maintenant revêtu d’une magnifique armure complète, à l’exception de sa tête, qui n’était protégée que par sa longue chevelure bouclée. Le reste de sa personne était enveloppé d’un tissu de mailles d’acier bronzé, dont le fond d’azur était richement damasquiné d’argent. Il portait l’éperon… son épée pendait à son côté, et son bouclier triangulaire était suspendu autour de son cou. On voyait sur ce bouclier un grand nombre de fleurs de lis semées sur le champ, origines de celles qui, réduites à trois, furent la terreur de l’Europe jusqu’au temps où elles éprouvèrent de nos jours de si nombreux revers. La stature colossale du comte Robert le rendait très propre à porter un costume qui avait une tendance à faire paraître courtes et replètes les personnes d’une taille ordinaire lorsqu’elles étaient armées de pied en cap. Ses traits calmes et rassis, exprimant un noble mépris de tout ce qui aurait pu étonner ou ébranler une âme vulgaire, couronnaient parfaitement cet ensemble vigoureux et bien proportionné. La parure de la comtesse était plus pacifique ; mais ses vêtements étaient courts et étroits comme ceux d’une personne qui pouvait être appelée à un violent exercice. Le dessus consistait en plusieurs tuniques sur le corps ; une jupe richement brodée, prenant de la ceinture et descendant jusqu’aux chevilles, complétait un costume qu’une dame eût pu porter dans des temps beaucoup plus modernes. Les boucles de sa chevelure étaient couvertes d’un casque léger ; seulement quelques unes s’échappant de dessous l’acier, se jouaient autour de sa figure et adoucissaient ses beaux traits, qui auraient pu autrement sembler trop sévères s’ils se fussent trouvés entièrement encadrés dans une bordure de ce métal. Sur cette élégante parure était jeté un manteau de velours d’un vert foncé, partant du cou, où une espèce de chaperon l’assujettissait au casque superbe ; ce manteau était couvert de broderies sur les bords et les coutures, et assez long pour balayer la terre. Dans une ceinture d’orfèvrerie délicatement travaillée, la comtesse de Paris portait un poignard de prix, et c’était la seule arme offensive que, malgré ses habitudes guerrières, elle eût prise en cette occasion.

La toilette (comme on dirait de nos jours) de la comtesse ne fut pas à beaucoup près aussitôt terminée que celle du comte Robert.