Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/15

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marmot va trouver Paul Pattison pour lui répéter sa leçon aussi naturellement qu’ils viennent à moi pour leur goûter, les pauvres petits, et qu’il n’y en a pas un qui songe jamais à s’adresser à vous pour un passage difficile ou pour un mot qui l’embarrasse, ou pour toute autre chose, si ce n’est pour des licet exire, ou pour tailler quelque vieille plume. »

Il est bon de savoir que cette virulente apostrophe vint fondre sur moi par une soirée d’été, tandis que je laissais tranquillement couler mes heures de loisir en achevant ma pipe, plongé dans les douces rêveries qu’a coutume de produire l’herbe nicotiane, plus particulièrement chez les personnes studieuses adonnées musis severioribus. Il me coûtait naturellement de quitter le sanctuaire ; je me trouvais entouré d’un nuage de fumée, et j’essayai de réduire au silence la voix bruyante de mistress Cleishbotham, qui a en elle quelque chose de singulièrement aigu et pénétrant.

« Femme, » dis-je d’un ton d’autorité domestique approprié à l’occasion, « res tuas agas… Occupez-vous de laver et de tordre votre linge, occupez-vous de vos ragoûts et de vos tisanes, ou de tout ce qui concerne les soins extérieurs à donner à la personne des élèves, et laissez le soin de leur éducation à mon sous-maître, Paul Pattison, et à moi. — Je suis du moins bien aise de voir, » ajouta la maudite femme (faut-il que je sois forcé de me servir de cette expression !) « que vous ayez le bon esprit de le nommer le premier, car il n’y a guère de doute qu’il marche le premier de la bande, si vous voulez vous donner la peine d’entendre ce que les voisins disent ou murmurent. — Que murmurent-ils ? Parle, sœur des Euménides, » m’écriai-je ; car l’œstrum irritant de la mercuriale contrebalançait totalement les vertus sédatives de la pipe et du pot de bière.

« Ce qu’ils murmurent ! » reprit-elle en montant aux tons les plus aigus de son diapason… « Mais ils murmurent, assez haut du moins pour que je puisse l’entendre, que le maître d’école de Gandercleugh n’est qu’une vieille femme hébétée, qui passe tout son temps à s’enivrer avec le cabaretier du village, et abandonne son école, le travail de ses livres et tout le reste aux soins de son sous-maître ; et de plus, les femmes de Gandercleugh disent que vous avez pris Paul Pattison pour écrire un nouveau livre, qui doit éclipser tout le reste de ce que vous nous avez donné jusqu’aujourd’hui ; et pour montrer quelle pauvre part vous avez à la besogne, elles ajoutent